Les producteurs de bovins veulent hausser leur production de 50 % d’ici 2025

AGRICULTURE – Les producteurs de bovins du Québec veulent relancer leur industrie qui connait des difficultés depuis la crise de la vache folle. Actuellement, le cheptel québécois compte environ 700 000 bêtes. L’objectif est d’amener ce nombre à un million, d’ici 2025.

Pour les producteurs de bovins, sauvegarder ce secteur de l’agriculture est crucial pour dynamiser l’économie et assurer l’occupation du territoire. Quelque 95 entreprises œuvrent en production bovine dans la MRC des Jardins-de-Napierville, selon l’Union des producteurs agricoles.

«Nous sommes rendus à un seuil critique, indique Serge Dethier, qui exploite la Ferme SDJ Polled Limousin, à Saint-Édouard, avec sa conjointe, Diane Joly. Le nombre de vaches reproductives est à la baisse en raison du vieillissement des producteurs et du manque de relève.»

M. Dethier possède un troupeau de 90 têtes. Il élève des vaches et des veaux Limousin, ainsi que des taureaux. Il œuvre dans ce domaine depuis maintenant 40 ans. Il est aussi vice-président du Syndicat des producteurs de bovins de la Montérégie-Ouest.

«La décision qu’on prend aujourd’hui va avoir un effet seulement dans cinq ans, prévient Kirk Jackson, président du Syndicat des producteurs de bovins de la Montérégie-Ouest. C’est le temps que ça prend pour élever un animal. C’est un marché où c’est difficile de s’adapter.»

Ressources

Selon M. Jackson, cet objectif de grossir le cheptel de 50 % est d’autant plus réaliste que le Québec dispose des ressources pour le faire, dont l’eau.

«On a la nourriture à portée de main pour les bêtes, explique-t-il. Avec toutes les grandes cultures qu’il y a dans la région, tout le parc d’engraissement se trouve en Montérégie-Ouest. On a de bons rendements et les sols sont fertiles.»

Difficultés

La crise de la vache folle a porté un dur coup à cette industrie qui ne s’en est jamais complètement remis. En 2003, un cas a été découvert en Alberta, après quoi les frontières se sont fermées et il était devenu impossible de vendre la viande à l’extérieur du pays.

«Le manque à gagner était de 300 $ par bête, explique M. Jackson. Ç’a vraiment fait mal. Beaucoup de producteurs ont alors pris leur retraite.»

En 2008 au Québec, on comptait plus de 200 000 bouvillons d’abattage. Il s’agit du dernier stade d’engraissement des animaux avant qu’ils ne soient vendus à l’abattoir. En 2017, il y en avait moins de 100 000, précise M. Jackson.

À cela s’ajoute l’impact de l’accord économique et commercial qui lie le Canada et l’Union européenne depuis septembre 2017. En vertu de cette entente, une quantité illimitée de veaux européens peuvent être vendus au pays.

«Les volumes de veaux européens qui entrent au Canada augmentent tous les mois et il est vendu 30 % moins cher», rappelle M. Jackson.

«L’important, c’est qu’on relance l’industrie. Si les gens d’ici ne font pas d’argent, ils vont aller travailler ailleurs.»

Serge Dethier, producteur de bovins, à Saint-Édouard

Relève

Le plan de développement de l’industrie bovine comprend différentes mesures, dont la création d’un programme pour inciter les jeunes à prendre la relève des entreprises existantes.

Les producteurs demandent aussi que les programmes de stabilisation des coûts de production soient simplifiés et mieux adaptés à la réalité, notamment pour l’achat d’animaux.

Bœuf Québec

Les producteurs de bovins veulent que le gouvernement les accompagne pour mettre sur pied un plan de marketing pour le veau du Québec et la viande certifiée Bœuf Québec.

Lancés au début de 2017, les produits Bœuf Québec sont identifiables grâce à une étiquette représentant un bœuf bleu. Cette certification indique que ce bœuf est né, a été élevé et abattu au Québec.

Ce produit est vendu dans les restaurants La Cage et Joe Beef. Dès cet été, la marque Bœuf Québec sera aussi disponible dans 293 magasins IGA de la province de Québec et du Nouveau-Brunswick.

Règlementation

Enfin, les producteurs demandent au gouvernement du Québec de revoir certaines de ses exigences réglementaires de façon à rester compétitif par rapport aux autres marchés.

«On veut rediscuter toutes les ententes environnementales et celles portant sur le bien-être animal, dit M. Jackson. Nous avons une des règlementations les plus sévères en Amérique du Nord.»

Il cite l’exemple d’une ferme qui possède 2500 bouvillons et qui souhaite augmenter à 3500, pour permettre d’intégrer sa relève de façon à faire vivre deux familles plutôt qu’une seule.

«Dès qu’on atteint le seuil de 3500 animaux, il faut passer au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement, déplore M. Jackson. Ce processus coûte 200 000 $, sans même savoir si ça va être accepté. J’ai parfois l’impression qu’on ne veut pas d’agriculture animale au Québec. Je pourrais aller en Alberta où il y a 95 % moins de règlementation et obtenir plus pour mon produit fini.»

Serge Dethier possède un troupeau de pur-sang Limousin. Il s’inquiète du déclin de cette production et du peu de relève dans ce secteur de l’activité agricole.

Avenir

Le cheptel canadien ne représente que 10 % du cheptel américain. En comparaison, le cheptel québécois représente seulement 5 % des troupeaux canadiens.

Seulement 20 % du bœuf consommé au Québec est produit localement. Il y a donc un fort potentiel de croissance pour de ce secteur, dans la province.

«Il faut que les gens demandent du bœuf du Québec partout, pense M. Dethier. C’est eux qui vont véritablement mettre de la pression.»

La production bovine québécoise en chiffres

11 000

C’est le nombre d’entreprises agricoles qui œuvrent dans cette filière.

710 900

Il s’agit du nombre de veaux et de bœufs produits chaque année.

1 G$

Cette production génère des ventes d’une valeur d’un milliard de dollars par année.

Source: L’Union des producteurs agricoles