Plus de 11 M$ pour freiner la dégradation des terres noires en Montérégie

AGRICULTURE – Le 24 avril, l’Université Laval, le CLD des Jardins-de-Napierville, les gouvernements du Canada et du Québec et 14 producteurs maraîchers de la région ont annoncé la création d’une chaire de recherche industrielle de 11,2 M$ pour trouver des solutions visant à freiner la disparition des sols organiques cultivés au Québec, plus particulièrement dans le sud de la Montérégie. L’annonce a été faite en présence de plusieurs représentants de l’Université, du député fédéral Jean-Pierre Poissant, secrétaire parlementaire de la ministre de l’Agriculture, de la députée provinciale de Huntingdon, Claire IsaBelle, du préfet de la MRC des Jardins-de-Napierville, Paul Viau, et des maires de la région.

C’est le CLD des Jardins-de-Napierville qui a convaincu l’Université de tenir la conférence de presse à Sherrington, à l’usine d’emballage CAMS dans le rang Saint-Louis. Le CLD est impliqué dans ce dossier depuis plus de 18 mois et dans bien d’autres dossiers agricoles comme le Pôle d’excellence en lutte intégrée.

Plus de la moitié de la production maraîchère de la province, en valeur marchande, provient de notre région. Composés de sols organiques, par rapport aux sols minéraux qui sont faits d’argile, de sable et autres matières, les terres noires disparaissent à un rythme de un à deux centimètres par an. À cette vitesse, elles auront complètement disparu dans 30 à 50 ans. D’où la nécessité d’agir rapidement pour contrer ce problème.

Des producteurs très impliqués

Le cri d’alarme a été lancé par une poignée de producteurs, notamment Denys Van Winden de Sherrington, des agronomes et des spécialistes des sols. Pour certains, les préoccupations remontent à plusieurs années. Plusieurs producteurs collaborent d’ailleurs depuis douze ans avec l’équipe de recherche de l’Université Laval. Leurs efforts de sensibilisation viennent de porter fruit avec la création de la chaire de recherche dirigée par le professeur Jean Caron, un chercheur émérite, spécialiste des sols.

C’est très préoccupant. On ne peut pas rester à ne rien faire. Il faut arrêter la dégradation des sols, sinon nos enfants et petits-enfants n’auront plus rien à cultiver. Ce serait dramatique.

Denys Van Winden

Le financement provient de plusieurs sources, d’abord d’un groupe de 14 producteurs qui vont y investir jusqu’à sept millions $, du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, du ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec, de la Fondation canadienne pour l’innovation, et de l’Université Laval.

Les 14 producteurs agricoles sont Delfland inc., Les Fermes R.R. et Fils inc., C. Isabelle et Fils inc., La Production Barry inc., Le Potager Montréalais Ltée, Le Potager Riendeau inc., Les Fermes du Soleil inc., Les Fermes Hotte et Van Winden inc., Les Jardins A. Guérin et Fils inc., Maraîchers J.P.L. Guérin et Fils inc., Production horticole Van Winden inc., Productions maraîchères Breizh inc., R. Pinsonneault et Fils Ltée, et Vert Nature inc.

Des travaux complexes

À l’aide de nouvelles approches jamais explorées auparavant sur la conservation et la restauration des sols organiques destinés à la culture maraîchère, l’équipe de recherche de l’Université Laval tentera de mieux comprendre les mécanismes qui contrôlent l’érosion éolienne, le drainage et le tassement des sols organiques dans les champs.

Partout sur la planète, les sols sont fatigués. Avec la population mondiale qui augmente, nous allons devoir produire plus avec nos sols, alors que leur qualité chute et que les superficies arables plafonnent. Nous devons absolument conserver cette couche arable qui nous sépare de la famine.

Jean Caron

Plus de 70 étudiants des trois cycles universitaires, cinq professeurs et quatre assistants de recherche vont participer au projet. Plusieurs étudiants sont d’ailleurs à l’œuvre depuis deux ans dans les champs de la MRC des Jardins-de-Napierville.

Plusieurs stratégies d’intervention seront testées, notamment la plantation de saules et de miscanthus pour la production de résidus qui serviront à enrichir le sol, la plantation d’arbres pour servir de murs pare-vent, la production de biomasse, la suspension de la culture sur certaines bandes de sols, etc. Des tests seront menés en serre, en cabinets de croissance et dans les champs.

Rappelons que les terres noires permettent la production d’une grande variété de légumes comme des carottes, des oignons, de la laitue, de l’ail, des céleris, des courges, des pommes de terre, etc. La perte de ces terres serait une catastrophe humaine pour les producteurs et leurs familles, et une catastrophe économique pour la région, pour le Québec et pour le Canada. D’où l’urgence d’agir.