Fierté agricole: les défis de la communauté LGBT en milieu rural

ACTUALITÉ – Travailler en agriculture comporte son lot de défis, que l’on pense aux horaires éreintants, aux aléas de la météo, mais aussi au sentiment d’isolement que peuvent ressentir les producteurs. Pour certains membres de la communauté lesbienne, gaie, bisexuelle et transgenre (LGBT) qui œuvrent dans le monde de l’agriculture, à ces épreuves s’ajoutent parfois celles des préjugés et du rejet. C’est la raison pour laquelle l’organisme Fierté agricole a été fondé, en 2012.

La communauté LGBT représente environ 10 % de la population générale, indique Joé Desjardins, président de l’organisme sans but lucratif Fierté agricole.

«Le milieu agricole, c’est 1 % de la population canadienne, précise-t-il. Donc, on est 10 % de 1 %. On est vraiment peu nombreux. De plus, l’agriculture n’est pas un domaine très populaire auprès des LGBT, bien que ce le soit de plus en plus.»

À l’occasion de la Journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie, le 17 mai, M. Desjardins explique la raison d’être de Fierté agricole, dont la mission est de faire connaître les réalités des personnes de la communauté LGBT en milieu rural et agricole et de faciliter leur intégration. Les bureaux de l’organisme sont situés à Saint-Hyacinthe, mais ses actions rayonnent partout au Québec.

«On ne veut pas être un ghetto dans un ghetto, précise M. Desjardins. On veut tisser des liens avec toute la communauté agricole. On touche à toutes les productions. À une même table, il peut y avoir un producteur de porc conventionnel et une productrice de légumes biologiques végane. On ne fait aucune discrimination par rapport à la taille de l’entreprise ou le lien de la personne avec l’agriculture. Tout le monde est bienvenu.»

L’organisme Fierté agricole organise des activités partout au Québec.

Difficultés

Le fait que les membres de la communauté LGBT en milieu rural soient peu nombreux rend parfois la socialisation et l’acceptation plus difficiles.

«Ça se passe bien pour certains, mais pour d’autres, c’est l’horreur, explique M. Desjardins. Dans les petits villages, les communautés sont très serrées. Si un père n’accepte pas que son fils ou sa fille soit gai, ça peut être le village au complet qui rejette la personne. Si la famille la supporte et demande aux autres de faire pareil, ce sera l’inverse. À la campagne, il n’y a pas l’indifférence qu’on retrouve à Montréal. Soit qu’il y a énormément de support ou énormément de rejet. C’est pour ça qu’on est là.»

De plus, il est souvent plus difficile pour eux de trouver l’amour, à la campagne. «L’émission L’amour est dans le pré, ce n’est pas pour rien, explique M. Desjardins. Les hétérosexuels représentent 90 % de la population et ils ont de la misère à rencontrer…»

Fierté agricole n’est pas un site de rencontre, prévient M. Desjardins. «C’est plus comme une ligue de hockey de garage, illustre-t-il. Ça fait du bien d’être avec du monde qui tripe sur la même chose que nous, une fois de temps en temps.»

On ne veut pas que notre diversité sexuelle soit un frein à notre travail.

-Joé Desjardins, président de Fierté agricole

Fierté agricole fait aussi la promotion de l’agriculture auprès de la communauté LGBT urbaine.

«Les conjoints qui viennent de la ville doivent s’adapter à l’horaire de la campagne, dit M. Desjardins. On est là pour faire le lien. J’ai déjà habité dans le Village, quand j’étais aux études. Je me couchais souvent à 4 h du matin. Là, je me lève à 4 h! Un jour, un couple gai est venu nous voir à notre kiosque lors de la parade de la Fierté. Ils nous disaient qu’ils ne vivaient vraiment pas d’homophobie. Leur problème c’était l’agriculture. Un des deux ne comprenait pas que l’autre devait faire le train le soir. C’était ça leur isolement.»

Alliée

Nicole Van Hyfte, propriétaire de la ferme Jardins la Clé du Sol, à Saint-Bernard-de-Lacolle, appuie Fierté agricole depuis plusieurs années. Elle est une grande amie de M. Desjardins.

«Je me suis tenue beaucoup avec lui au moment où il est sorti du garde-robe, dit-elle. À l’époque, on entendait moins parler d’homosexualité, c’était tabou. Ça m’a ouvert les yeux sur un monde que je ne connaissais pas. C’est important d’ouvrir les yeux des gens sur ces réalités. Ce n’est pas toujours facile. Ce métier, les membres de la communauté LGBT le pratiquent très bien. Ce sont des gens comme tout le monde.»

Services

Fierté agricole fait aussi de la sensibilisation auprès du milieu de la formation en agriculture, en rencontrant des enseignants pour les sensibiliser aux réalités de la communauté LGBT.

Un infirmier travaille aussi de manière bénévole pour l’organisme. Il est possible de le consulter pour un problème de consommation, le dépistage d’une infection transmissible sexuellement et par le sang ou encore un pour un problème de santé mentale.

Pour obtenir plus d’information à propos de Fierté agricole, il suffit de visiter le site Internet fierteagricole.org ou la page Facebook Fierté Agricole.