Gestion des matières résiduelles: la crise du verre est un faux problème

ENVIRONNEMENT – Il n’y a pas vraiment de crise du verre dans le système québécois de gestion des matières résiduelles, en tout cas pas plus qu’ailleurs en Occident. Et la consigne n’est pas la solution magique qu’on peut penser à première vue.

Au début de l’année, un reportage sur une collecte du verre par apport volontaire qui se tient à Saint-Denis-de-Brompton a ramené le dossier de la gestion du verre récupéré dans l’actualité. Le débat s’est transporté dans la région puisque le verre de Saint-Denis est livré chez 2M Ressources, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Le sujet a été soulevé tant à l’assemblée du conseil municipal qu’à celui de la MRC du Haut-Richelieu, ce qui a incité Compo-Haut-Richelieu à faire le point sur la question.

Plus le cas

Directrice générale de Compo, Louise Fecteau raconte qu’aussi loin qu’elle se souvienne, le recyclage du verre a posé problème. Et de façon cyclique, le problème revient dans l’actualité, généralement avec l’élection d’un nouveau gouvernement, observe-t-elle.

Longtemps, convient-elle, le tri du verre laissait à désirer, mais ce n’est plus le cas dans la grande majorité des centres de tri. Il reste encore quelques centres qui ont négligé d’investir dans leur modernisation. Ceux-là obtiennent un produit de moindre qualité, mais la grande majorité livre un verre sans contaminants. Cependant, les couleurs sont mélangées.

Il y a deux grandes catégories de verre, le clair et le coloré. Les recycleurs qui veulent produire des contenants de verre clair doivent nécessairement s’approvisionner en verre clair. Pour eux, le problème est réel. C’est vrai au Québec, mais aussi ailleurs. Au Québec, c’est le cas de la compagnie Owens Illinois qui fabrique aussi des contenants de verre teinté.

Débouchés

Les débouchés pour le verre de couleur sont limités. Une fois broyé, il est souvent utilisé comme matériau de recouvrement dans les centres d’enfouissement de déchets. L’idée peut sembler choquante pour certains, mais elle n’est pas nécessairement mauvaise quand on tient compte de l’ensemble des impacts environnementaux.

Quotidiennement, les centres d’enfouissement ont l’obligation de recouvrir leur site d’une couche de terre ou de sable. Au départ, ils utilisent les déblais d’excavation, mais ils sont rapidement contraints d’acheter du sable pour le transporter sur le site. L’excavation et le transport de ce sable représentent aussi des coûts financiers et environnementaux. Le verre pulvérisé remplace ce matériau. D’ailleurs, le verre est fabriqué à base de silice.

Consigne

L’une des contraintes majeures du verre est son transport. Il s’agit d’une matière lourde. Idéalement, il faut en disposer à l’intérieur d’un circuit court. Pour cette raison, la consigne de bouteilles de bière est avantageuse dans la mesure où elles sont uniformisées. Les brasseries sont à proximité de leur marché.

Quand on parle des bouteilles de vin, c’est autre chose. Ces bouteilles ne sont pas réutilisables. Il est impensable de retourner des bouteilles vides en France ou en Australie. Elles sont concassées en calcin (poudre de verre). Et si on établissait une consigne, elles subiraient le même sort après plusieurs étapes de manutention, de transport et d’entreposage.

Ce sont autant de coûts financiers et environnementaux, fait valoir Mme Fecteau. En outre, les bouteilles de vin sont déjà récupérées à 87 %, le plus haut taux de récupération parmi toutes les matières déposées dans le bac.

Apport volontaire

C’est la même chose pour la collecte par apport volontaire, comme le fait Saint-Denis. Recyc-Québec a analysé l’expérience. Le système est coûteux. Il vient doubler la collecte sélective, multipliant la circulation des véhicules des citoyens et des camions qui transportent le verre.

Pendant ce temps, la collecte sélective se poursuit pour ramasser les autres contenants et le papier. Avec la consigne et l’apport volontaire, le financement des collectes reposerait sur ces catégories de produits. Et il y aurait encore du verre dans les bacs. Il est certain que des citoyens continueraient d’y déposer leurs bouteilles vides comme ils le font avec nombre de cannettes d’aluminium et autres contenants consignés.

De leur côté, les centres de tri perdent une matière première. Avec le temps, ils risqueraient de désinvestir dans l’équipement servant au tri du verre, ce qui nuirait d’autant à la qualité.