Les insectes à la rescousse des agriculteurs

Utiliser des insectes pour contrer de petites bestioles qui ravagent les champs, telle est l’une des techniques utilisées par des producteurs de la région pour réduire l’usage de produits chimiques. La première Journée portes ouvertes mise sur pied par le Pôle d’excellence en lutte intégrée (PELI), basé au Centre local de développement (CLD) des Jardins-de-Napierville, a aussi mis en vedette capteurs de spores, stations météo, mouches stériles et pyrodésherbeur.

Le 10 juillet, plus de 100 personnes ont participé à l’événement et visité quatre entreprises horticoles en Montérégie Ouest, qui utilisent des outils ou des techniques de lutte intégrée. Parmi eux des producteurs, mais aussi des conseillers techniques de différents clubs-conseils en agroenvironnement, des universitaires et plusieurs représentants du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ).

À la Ferme Thibert et fils, nous avons fait la connaissance de la punaise soldat, qui attaque littéralement le doryphore de la pomme de terre, qui est le principal insecte ravageur de cette culture.  On nous a aussi présenté un prototype de relâcher mécanique, qui permet de déployer les punaises soldat à grande échelle, à l’aide de… popcorn. 

Plutôt que de disperser les punaises à la main, on les insère dans des cylindres de plastiques remplis de popcorn, qui sont fixés à une remorque, tirée par un tracteur.  Cela permet d’éviter que les punaises restent collées sur les parois du cylindre. 

Anatis Bioprotection était présent avec ses trichogrammes, des guêpes microscopiques qui pondent leurs œufs à l’intérieur des œufs de papillons, ce qui permet de les éliminer.  Cette technique est efficace pour la culture du maïs, des poivrons, mais aussi des pommes, tout en réduisant l’utilisation d’insecticides chimiques.

Finalement, on nous a présenté un petit dispositif qui sert à empêcher le carpocapse, un papillon dont la larve se développe à l’intérieur des fruits, de détruire les récoltes de pommes et de poires.  Les mâles retrouvent les femelles grâce à une hormone qu’elles sécrètent.  La méthode employée consiste à placer des petits bâtons enduits de cette hormone, dans les pommiers.  Cette surabondance de l’hormone provoque une confusion chez les mâles qui peinent à repérer les femelles, ce qui réduit d’autant la possibilité qu’ils s’accouplent.

Stations météo et mouches stériles

Notre visite a débuté chez Delfland, qui produit des carottes, des oignons et des échalotes françaises.  Le Consortium PRISME y a installé de petites stations météo, qui fonctionnent à l’énergie solaire.  Elles sont disposées à chaque 4 km et elles permettent de mesurer plusieurs paramètres en temps réel comme la vitesse et la direction du vent, le taux d’humidité dans le sol, le temps d’insolation, etc. Chaque station est munie d’un modem qui transmet les données par internet.  Cela permet de produire des cartes de pluviométrie, qui sont ensuite envoyées aux agriculteurs.

Lorsqu’il pleut après un arrosage de pesticides, les agriculteurs doivent souvent arroser à nouveau.  Ces cartes permettent de voir à quel endroit précis l’orage est tombé et permet aux producteurs d’arroser seulement là où la pluie était plus abondante.  Ces stations coûtent 3500$, incluant l’analyse des données, mais elles permettent de réduire le coût en pesticides.

On nous a aussi présenté un capteur de spores, qui permet d’intercepter des spores dans l’air et ainsi de détecter certaines maladies qui s’attaquent à l’oignon, mais aussi aux fraises, aux framboises et aux patates. Delfland a aussi recours à la technique de la mouche rose, stérile, afin de réduire la population de la mouche de l’oignon.   

Finalement, la Coop Uniforce  propose notamment les champignons mycorhizes qui, en s’associant aux racines des plants, leur permettent d’augmenter leur capacité d’absorption de l’eau et des nutriments et ainsi améliorent leur croissance, sans avoir recours aux engrais chimiques.

Une machinerie mieux conçue

Notre visite s’est poursuivie chez Univerco, à Napierville.  Cette entreprise, fondée par la famille Bisaillon en 1978, vend, mais aussi conçoit, de la machinerie agricole, de façon à répondre aux besoins précis des agriculteurs.

Par exemple, un pyrodésherbeur, qui consiste en une remorque attachée à un tracteur, munie de brûleurs alimentés au gaz propane et qui permettent de brûler les mauvaises herbes, plutôt que d’épandre des herbicides dans les champs.  Univerco a aussi mis au point de la machinerie permettant de mieux brosser les carottes et ainsi de réduire la quantité d’eau utilisée pour les laver. 

Gestion de l’eau en milieu agricole

Finalement, nous avons visité la Ferme R&R et Fils, où l’on produit des carottes et des oignons.  Le producteur, Éric Rémillard, a installé un biofiltre, qui lui permet de filtrer l’eau qu’il utilise pour nettoyer son pulvérisateur de pesticides, avant de la retourner au champ.  Il a aussi aménagé des bandes végétales le long d’un ruisseau qui traverse ses terres, de manière à empêcher l’érosion du sol et la dispersion de produits chimiques dans l’eau. 

Nous discuterons plus en détail d’initiatives de producteurs de la région pour limiter la pollution de l’eau, dans un article que vous pourrez lire la semaine prochaine dans votre Coup d’œil.

«Nous sommes très satisfaits de la participation des gens.  Nous attendions une cinquantaine de personnes et nous en avons reçu le double, explique Élaine Grignon, agronome et coordonnatrice du PELI.  Beaucoup de gens sont venus de l’extérieur, de Lanaudière, de l’Estrie, de Québec et des Laurentides.  La lutte intégrée ne doit pas avoir de frontière.»