Greffée des poumons en 2011: elle rencontre la famille de son donneur à la télé

TÉMOIGNAGE – Novembre 2011. Le téléphone sonne. Le chirurgien de Julie Bisaillon lui annonce qu’elle aura la greffe de poumons qu’elle attend depuis sept mois. On ne lui donnait plus que deux mois à vivre. Cinq ans plus tard, elle rencontre pour la toute première fois Lucille Perreault, la veuve de son donneur.

C’est l’équipe de l’émission Deuxième chance, animée par Patrick Lagacé et Marina Orsini, qui a contacté Mme Bisaillon pour lui suggérer de l’aider à retrouver la famille de son donneur.

«Au début, je n’étais pas certaine de vouloir le faire au niveau éthique, confie la résidente de Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix. J’ai toujours voulu serrer cette famille dans mes bras et les remercier, mais on ne sait pas où les gens en sont dans leur cheminement personnel.»

Finalement, Mme Bisaillon est très heureuse d’avoir pu remercier cette famille pour ce qu’elle a fait pour elle, sans même la connaître, et d’avoir appris à connaître un peu mieux son donneur.

«Ça m’a apporté beaucoup, dit-elle. Je me suis sentie plus complète. Quand on est greffée, on est toujours en duo. On se pose toujours la question à savoir qui est cette personne-là.»

La jeune femme souhaiterait qu’une rencontre puisse être possible au Québec. Actuellement, le processus de don d’organes est confidentiel.

Les receveurs peuvent toutefois écrire à la famille des donneurs. Transplant Québec, l’organisme qui coordonne les dons d’organes dans la province, prend connaissance de la correspondance pour s’assurer que l’identité du receveur reste secrète. Transplant Québec communique ensuite avec la famille du donneur pour savoir si elle veut recevoir le message.

«Ça devrait être fait, mais de manière encadrée, comme aux États-Unis, explique Mme Bisaillon. Les rencontres se font dans des endroits neutres avec un psychologue qui peut faire le suivi si ça ne se passe pas bien.»

Malgré tout, certaines familles de donneurs réagissent mal à ces rencontres. «Il arrive parfois qu’elles cherchent une façon de se raccrocher à l’être aimé et ça peut parfois être lourd», dit-elle.

Elle relate une anecdote où la famille d’un donneur a réclamé de l’argent à la famille d’un receveur parce qu’elle a appris qu’il était bien nanti. Les membres de la famille voulaient de l’argent en échange d’avoir prolongé la vie du donneur grâce au don d’organe de leur proche.

Santé

Aujourd’hui, Mme Bisaillon va relativement bien. Sa maladie, la lymphangioléiomyomatose, une maladie rare et orpheline, atteint cependant d’autres organes. Elle pourrait devoir subir une greffe de reins.

L’espérance de vie moyenne des greffés pulmonaire étant de cinq ans, elle a célébré cet anniversaire en novembre.

«Je suis officiellement périmée !, lance-t-elle en riant. Ça ne me fait pas peur. Je suis déjà supposée être morte. J’aurais dû être décédée entre l’âge de 2 et 5 ans.»

Entre-temps, elle travaille entre 15 et 20 heures par semaine dans un magasin à Saint-Jean-sur-Richelieu. Elle fait aussi du bénévolat et occupe le poste de directrice générale de la Fondation des greffés pulmonaires du Québec.

En contact

Mme Bisaillon et Mme Perreault ne se sont pas revues depuis le tournage de l’émission, à l’été 2016. Elles prennent des nouvelles l’une de l’autre grâce à une connaissance commune qu’elles ont découvertes. Une collègue de travail de Mme Bisaillon connaît Mme Perreault.

«Je suis persuadée qu’on va se revoir et prendre un café, dit Mme Bisaillon. Je m’apprête à lui réécrire, mais je ne veux pas brusquer les choses.»

Don

Mme Bisaillon rappelle qu’au-delà de signer l’arrière de sa carte d’assurance-maladie, il est important de discuter du don d’organes avec ses proches. Lorsque survient le décès, ce sont les membres de la famille qui ont le dernier mot pour autoriser ou non le don d’organes, même si la carte du défunt est signée.

«Si on en parle souvent, la famille va respecter nos dernières volontés, souligne Mme Bisaillon. Dans le doute, les gens vont dire non.»

Pour revoir l’épisode

Il est possible de revoir l’épisode de l’émission Deuxième chance qui porte sur les retrouvailles de Julie Bisaillon et la famille de son donneur, diffusée le 4 février, à Radio-Canada.  

Quelques données sur le don d’organes
3 La mort neurologique d’un donneur potentiel doit être confirmée par trois médecins avant que l’on procède au prélèvement des organes.
8 Un seul donneur d’organes peut sauver jusqu’à huit vies et améliorer la vie d’une vingtaine personnes grâce au don de cornée ou de peau, par exemple.
56 Selon Transplant Québec, 56 personnes étaient en attente d’un don de poumon au Québec, contre 57 qui étaient greffés en 2015. Le temps d’attente moyen pour recevoir un don était de 488 jours.
Source: Fondation des greffés pulmonaire du Québec