Les travailleurs agricoles pourront se syndiquer

Tous les travailleurs agricoles du Québec ont le droit de se syndiquer depuis le 11 mars.  Ils ont acquis ce droit depuis que la Cour supérieure du Québec a déclaré que l’article du Code du travail qui les excluait ne respectait pas la Charte canadienne des droits et libertés.  «C’est une avancée importante pour la protection des travailleurs agricoles au Québec», estime Gilles Trudeau, professeur à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et expert en droit du travail.

C’est que le paragraphe cinq de l’article 21 du Code du Travail privait les employés qui travaillaient sur une ferme employant moins de trois employés permanents à l’année du droit de se syndiquer.  La Cour supérieure a rendu une décision le 11 mars 2013, à l’effet que ce paragraphe ne respectait pas la Constitution canadienne, privant ces travailleurs de leur droit de s’associer.  Dans son jugement, la Cour laissait un an au gouvernement pour modifier l’article du Code du travail et le rendre conforme à la Charte des droits sans quoi, le paragraphe cinq disparaîtrait, tout simplement.  En date du 11 mars 2014, le gouvernement n’avait toujours pas modifié l’article 21.

«Ils auraient pu contester devant la Cour d’appel, explique M. Trudeau.  Le gouvernement a décidé de ne pas contester et ils ont laissé écouler les délais.  C’est certainement un choix politique par le procureur général de ne pas défendre la loi.»

Politique

Selon M. Trudeau, cette disposition de la loi existait depuis 1965.  «Le législateur entendait protéger les fermes familiales de la syndicalisation, explique-t-il.  C’est une question politique.  On a toujours voulu protéger les fermes familiales en disant qu’elles n’étaient pas des employeurs comme les autres.»

Pourtant, de nombreux travailleurs occupent des emplois saisonniers ou travaillent chez de petits employeurs, sans être exclus du Code du travail, fait remarquer M. Trudeau.  Pensons seulement aux employés de dépanneur.

Il est vrai que le Canada signe des ententes avec les pays d’origine des travailleurs agricoles étrangers, dont le Mexique et le Guatemala, relatives à leurs conditions de travail, mais ce n’est pas équivalent à la protection d’une convention collective, soutient M. Trudeau.  «Il y en a eu des fermes en Montérégie devant les tribunaux à cause des conditions inhumaines imposées aux travailleurs venus de l’étranger.  La Cour suprême dit que ce sont des travailleurs vulnérables, dont la liberté d’association doit faire l’objet d’une protection de la part du législateur», souligne-t-il.