MRC des Jardins-de-Napierville: les fermes laitières en voie de disparition

Agriculture – Depuis 20 ans, le Québec a perdu 5094 fermes laitières, soit 46,5% de son industrie. Une hécatombe qui ne semble pas près de s’arrêter, alors que plus de 200 producteurs ont cessé leurs activités l’an dernier. La MRC des Jardins-de-Napierville ne fait pas exception avec une diminution de près de 60% du nombre de fermes laitières sur son territoire depuis 1996.

En 1996, on comptait 10 945 producteurs laitiers au Québec, dont 109 dans la MRC des Jardins-de-Napierville.

En 2015, on ne recense plus que 5851 producteurs laitiers au Québec. Pour être plus précis, on a amorcé l’année avec 5802 fermes laitières avant de la terminer avec 5590 entreprises.

Dans les Jardins-de-Napierville, on n’en comptait plus que 45 en 2015, ce qui représente une diminution de 58,72% par rapport à 1996.

Cette statistique place les Jardins-de-Napierville au 9e rang parmi les dix MRC dont le taux de décroissance du nombre de fermes laitières est le plus élevé.

On dénombrait 249 fermes laitières dans la MRC du Haut-Richelieu en 1996, contre 137 en 2015 (une baisse de 44,98%).

C’est dans la MRC de Bellechasse que l’on compte le plus de fermes laitières avec 273 entreprises en 2015. On en comptait toutefois 479 en 1996, soit 43% de plus.

À l’opposé, c’est dans les MRC des Îles-de-la-Madeleine, de La Haute-Gaspésie et de Bonaventure que l’on retrouve le moins de fermes laitières avec seulement sept entreprises en 2015. On en comptait pourtant 20 en 1996.

La bonne nouvelle, c’est que la production de lait continue de croître.

Tendance mondiale

Le porte-parole des Producteurs de lait du Québec, François Dumontier, refuse de s’alarmer. «C’est une tendance mondiale que l’on observe aussi aux États-Unis et en France. Les gens adoptent un mode de vie urbain et le métier de producteur agricole est un métier difficile», observe-t-il.

Malgré la perte de nombreuses fermes, les autres producteurs récupèrent les quotas de production et la croissance se poursuit. On est toutefois encore bien loin du modèle des mégafermes américaines. «Nos fermes moyennes ont environ 60 vaches, on est loin des 1000 têtes aux États-Unis», fait remarquer M. Dumontier.

À son avis, l’industrie laitière du Québec n’est pas menacée («pour l’instant») puisque malgré les ententes internationales, le système de gestion de l’offre est maintenu.

Insécurité et manque de relève

Sur le terrain, c’est l’insécurité et le manque de relève qui a raison de trop nombreux agriculteurs. «Toutes les ententes internationales qui visent la gestion de l’offre, ça crée de l’insécurité et ça pousse des producteurs à vendre leur ferme», affirme le président de l’UPA Chaudière-Appalaches Nord, Paul Doyon.

Dans sa région, la MRC de Bellechasse est celle qui compte le plus de producteurs laitiers, mais aussi le plus de pertes de fermes laitières. Pour ajouter à l’insécurité, le manque de relève vient compliquer le portrait. «Quand un producteur veut prendre sa retraite et qu’il n’a pas de relève, ce sont les autres producteurs qui rachètent son quota», note M. Doyon.

François Dumontier, rappelle tout de même que le secteur laitier est celui qui compte le plus de relève parmi les métiers agricoles.

La baisse des revenus et l’absence de relève parmi les causes  

Plusieurs raisons expliquent la diminution du nombre de fermes laitières au Québec. Parmi elles, l’absence de relève et une baisse importante des revenus dans les dernières années, estime Catherine Turgeon, conseillère pour les Producteurs de lait de la Montérégie-Ouest.

Mme Turgeon remarque que la taille des fermes laitières tend à grossir tandis que leur nombre diminue. Le manque de relève explique en partie cette situation.

Elle souligne que les familles sont moins nombreuses de nos jours et que les jeunes ont de plusieurs opportunités d’emploi.

Revenus

Mme Turgeon indique aussi la diminution du nombre de fermes laitières au Québec par l’importante perte de revenus des producteurs. Depuis une dizaine d’années, elle les estime entre 4% et 6%.

Cette baisse de revenus coïncide avec l’augmentation des importations de protéines laitières des États-Unis, que les transformateurs utilisent à la place du lait 100% Canadien dans les fromages et les yogourts.

Ce produit passe entre les mailles de la gestion de l’offre. Pendant ce temps, les producteurs d’ici doivent transformer leurs surplus en lait en poudre qui sont vendus à perte.

Mme Turgeon explique aussi la diminution du nombre de fermes laitières par l’incertitude des producteurs par rapport aux conséquences qu’aura l’entrée en vigueur du Partenariat transpacifique, cet accord de libre-échange regroupant une douzaine de nations.  

Avenir

Quoi qu’il en soit, Mme Turgeon est d’avis qu’il n’y a pas péril en la demeure. «On perdait 3% ou 4% de producteurs par année, dit-elle, mais depuis les dix dernières années, on en perd de moins en moins, environ 1%.»

Bien que le nombre d’agriculteurs diminue, la production de lait continue d’augmenter. Souvent, les quotas de productions sont simplement rachetés par d’autres producteurs qui prennent de l’expansion. La taille moyenne d’une ferme laitière au Québec est d’environ 60 vaches. «On a encore des producteurs qui continuent de croire en l’avenir», conclut Mme Turgeon.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Avec la collaboration de Marc-André Couillard