Vignoble Angell à Saint-Bernard-de-Lacolle: le plus vieux vignoble du Québec se fait retirer son permis
JUGEMENT – Dans une décision rendue le 26 novembre dernier, la Régie des alcools, des courses et des jeux a déterminé que le Vignoble Angell n’avait plus la capacité requise pour détenir un permis de producteur artisanal de vin.
Cette décision a été rendue au terme d’une audience qui s’est tenue au Palais de justice de Montréal, le 8 octobre 2015. Le propriétaire du vignoble, Jean-Guy Angell, ne s’est pas présenté à l’audience, lit-on dans la décision.
On reproche à M. Angell de ne pas avoir maintenu ses équipements en état de fonctionnement, ce qui pouvait porter atteinte à la sécurité publique.
Le Vignoble Angell, situé à Saint-Bernard-de-Lacolle, détenait le permis numéro deux, ce qui en faisait le plus ancien de la province puisque le producteur qui avait le tout premier permis émis n’est plus en activité. Il a ouvert ses portes en 1982.
Allégations
L’avocat de la Régie a notamment plaidé à l’effet que les vignes ne sont pas en état de produire, que le chai est en mauvais état, qu’il dégage une odeur nauséabonde et qu’il abrite de la moisissure.
«Selon la Direction du contentieux, l’état de la situation révèle un désintéressement clair du titulaire à poursuivre ses activités de production vinicole», peut-on lire dans la plaidoirie de la Régie.
Rappelons que le permis de M. Angell a été suspendu par la Régie pendant 180 jours, en 2014, en raison de différents manquements qui avaient été signalés lors d’inspections réalisées en 2006, 2010, 2011 et 2013.
Dans la décision rendue par la Régie, on peut lire que M. Angell s’était engagé volontairement à corriger les lacunes découvertes par les inspecteurs. La Régie reproche à M. Angell de ne pas les avoir corrigées.
Réactions
Jean-Guy Angell ne nie pas qu’il n’est plus intéressé à produire du vin. Depuis de nombreuses années déjà, il a jeté son dévolu sur son autre passion: les arts martiaux. Il dit posséder une cinquantaine d’écoles de karaté à travers le Canada.
«Je ne veux plus être dans cette ligne-là, dit-il. J’aimais faire la vigne, mais je n’ai plus la passion.» Des 37 000 pieds de vigne qu’il possédait, il dit en avoir arraché plus de 20 000, il y a trois ans. «Je ne veux plus jamais entendre parler de ça dans ma vie», affirme-t-il.
M. Angell reproche à la Régie des alcools ses méthodes cavalières et le peu de respect qu’elle démontre pour les gens qui comme lui, ont été les premiers à planter de la vigne au Québec.
«Je suis un pionnier dans ça, dit-il. Pendant 20 ans, j’ai vendu du vin et j’ai aidé beaucoup de gens. Pour me remercier, ils m’ont amené devant le commissaire. Les inspecteurs entrent chez vous comme s’ils étaient la police et les vignerons des bandits. Ça m’a fait de la peine d’être traité comme ça par une gang de fonctionnaires.»
À 75 ans, M. Angell dit ne pas vouloir se battre pour avoir gain de cause. Il ne contestera pas la décision rendue par la Régie. Il lui reste environ 3000 plants de vigne et il compte vendre ses raisins.
Il compte maintenant se lancer dans la production de bleuets. «J’ai 2000 plants et je vais en planter 1000 de plus, dit-il. Quand mon petit garçon de six ans va être grand, il y en aura 50 000 et il pourra passer sa vie ici.»