Un air d’Auroville à l’église de Saint-Blaise
Culture. En 2019, l’artiste-sculpteur Robert Lorrain a fait l’acquisition de l’église de Saint-Blaise-sur-Richelieu. Son ambition est d’en faire un centre d’art, musée et centre éducatif alternatif pour la jeunesse. Largement inspiré par la ville internationale d’Auroville située en Inde, Robert Lorrain cultive l’ambition d’y changer le monde, un esprit à la fois.
L’église de Saint-Blaise a été dépouillée de sa fonction de culte en 2018. L’année suivante, Robert Lorrain en a fait l’acquisition pour la coquette somme de 175 000 $, soit environ 200 000 $ de moins que le prix d’origine. Il a alors donné l’église au Centre créatif l’Élan, une société sans but lucratif créée par l’artiste.
L’édifice, érigé jadis juste à côté de l’Institut Feller (un pensionnat baptiste qui a fermé ses portes en 1967), constituait d’ailleurs un point de rassemblement pour les premiers pionniers de Saint-Blaise. Elle vise désormais à attirer des pionniers d’une nouvelle ère.
Rénovations
Bâtie en 1883, l’église vient avec un beau presbytère et se dresse sur un large terrain bordé par la nature. Lors de la vente, la bâtisse avait été vidée de son mobilier et de ses ornements. L’église nécessitait alors de nombreux travaux de rénovation, estimés à 600 000 $ par un architecte mandaté à l’époque par la paroisse.
Robert Lorrain consacre donc désormais ses journées à la rénovation de l’église où il rêve d’un projet réformateur et inspirant. Entre musée d’artefacts et d’antiquités, centre de méditation et de yoga et centre éducatif alternatif, les idées fusent dans l’esprit de M. Lorrain. Le souci est désormais de trouver la main-d’œuvre et la communauté idéale pour les développer.
Auroville
La vie et l’œuvre de Robert Lorrain sont indétachables de sa jeunesse passée en -Inde. Yogi appliqué, l’artiste a participé à la construction d’Auroville, une cité internationale située à proximité de Pondichéry en Inde.
Modèle utopique d’une société autosuffisante et sans gouvernement, cette ville s’est bâtie dès 1968 grâce à l’intervention de diverses nationalités réunies autour de la Mère, une mystique nommée Mirra Alfassa, qui deviendra à elle-même un concept pl us large de la Mère universelle. Particulièrement populaire chez les hippies de l’époque, le concept est aujourd’hui souvent réduit, à tort, à un sectarisme. Le projet a pourtant reçu le soutien de l’UNESCO à maintes reprises, bien qu’il ait des airs du mythe de la Tour de Babel.
Robert Lorrain ne se séparera jamais de cette philosophie, qui tire ses origines du maître indien Sri Aurobindo dont l’approche spirituelle représente la synthèse du yoga. Si Auroville est aujourd’hui tombée entre les mains du gouvernement indien à la suite de problèmes de cohabitation, cette pensée demeure.
La philosophie se base sur les apprentissages de la nature et sa conservation, mais aussi sur l’entraide et la pleine conscience. Elle a mené à l’ouverture de centres éducatifs alternatifs Aurobindo à Pondichéry, qui mènent de nombreuses expérimentations sur les programmes scolaires et l’éducation depuis 1943.
Saint-Blaise
M. Lorrain souhaite donc ouvrir un centre créatif et éducatif à l’église de Saint-Blaise. Songeant aux premiers pionniers de la ville et inspiré par le populisme et la détermination d’hommes tels que Lionel-Groulx ou encore Alphonse Desjardins, il ose encore rêver grand à 84 ans.
L’artiste explique que l’église accueillerait ainsi une exposition d’antiquités de diverses cultures, mais pourrait aussi recevoir des concerts et des conférences. Il s’intéresse particulièrement à créer un projet connexe pour la jeunesse, inspiré des établissements
Aurobindo de Pondichéry.
« C’est finalement une philosophie qui permet de créer des individus qui seront capables de faire face aux difficultés du développement international », résume Robert Lorrain, plaçant la nature au centre de celleci. Concrètement, on y apprendrait donc l’herboristerie par exemple, au même titre que l’art : en somme, toute manière de se remettre en ordre avec la nature.
Ambition
L’artiste rêve même d’impliquer l’UNESCO dans le projet et de le lier à un autre centre
similaire à proximité d’Auroville, en y achetant un terrain. Il ne lui manque plus que de la
main-d’œuvre et des « personnes sincères » qui comprendraient sa vision sans le catégoriser comme un allumé.
Ce n’est finalement pas le premier tour de force de M. Lorrain, puisqu’il a ouvert le premier restaurant végétarien et biologique de -Montréal dans les années 60, bien avant la création du premier -Mouvement pour l’agriculture biologique au Québec (débarqué en 1974).
Rassemblant une véritable communauté entre folklore québécois et spiritualité orientale, la coopérative O-Pti-Zoizo avait même fait l’objet d’un documentaire réalisé par Pierre Archambault en 1970. Il a donc bon espoir de réaliser ce projet d’envergure à l’église Saint-Blaise, qui ouvrirait idéalement ses portes au public à l’été 2025.