Interdiction du matériel Huawei: les petites entreprises pourraient être pénalisées

Des experts affirment que les petites entreprises de télécommunications indépendantes seront les plus touchées par la décision du gouvernement fédéral d’interdire aux sociétés chinoises Huawei Technologies et ZTE de s’impliquer dans le réseau sans fil 5G du Canada, puis éventuellement de bannir leurs produits des équipements de services 4G existants.

Le ministre de l’Innovation, François-Philippe Champagne, a déclaré jeudi que le gouvernement ne rembourserait pas les entreprises qui doivent retirer ces équipements de leurs réseaux d’ici le 31 décembre 2027.

Des experts en télécommunications affirment que les petites entreprises comme Ice Wireless, qui dessert le nord du Canada et s’est associée à Huawei en 2019, ainsi que le fournisseur d’accès internet rural de la Colombie-Britannique, ABC Communications, qui s’est également associé à Huawei en 2019, pourraient être affectés négativement.

«Nous ne parlons pas d’entreprises qui disposent de beaucoup de liquidités. Elles vont devoir cesser d’investir dans la technologie qu’elles ont en place et trouver d’une manière ou d’une autre l’argent nécessaire pour remplacer l’équipement au cours des cinq prochaines années», a déclaré dans une entrevue Mark Goldberg, consultant en télécommunications.  

«C’est une affaire plus importante pour les petits acteurs, proportionnelle à leurs ressources», a indiqué l’ancien directeur financier de Telus, Robert McFarlane. 

M. McFarlane note que les États-Unis avaient créé un fonds pour fournir des subventions aux opérateurs ruraux travaillant avec Huawei lorsqu’ils avaient interdit l’entreprise, ce que le Canada n’a pas établi.

Les plus grandes entreprises de télécommunications du Canada, dont Telus et la société mère de Bell Canada, BCE Inc., seront probablement en mesure d’absorber les coûts associés au retrait de l’équipement 4G Huawei, estiment des experts.

Telus et BCE ont chacun déclaré en 2020 qu’ils s’éloigneraient de Huawei et travailleraient avec le suédois Ericsson en tant que fournisseur de leurs réseaux 5G.

Les experts ont également dit que Rogers Communications, dont le partenariat avec Ericsson a débuté en 2018, est dans une position encore meilleure. 

Même si le fournisseur d’accès internet rural Xplornet Communications a annoncé en 2020 qu’il ne dépendrait plus de Huawei pour son équipement, il pourrait faire face à des obstacles financiers lors de sa transition de la 4G à la 5G, car il n’a pas les mêmes réserves de liquidités que les grands joueurs canadiens, ajoutent-ils.

Huawei Canada a réagi à la décision d’Ottawa, affirmant qu’il s’agit «d’une décision politique malheureuse qui n’a rien à voir avec la cybersécurité ou l’une des technologies en question».

Huawei Canada a ajouté que l’interdiction de ses équipements et services pourrait entraîner «une perte économique importante au Canada et faire grimper le coût des communications pour les consommateurs canadiens».

Dans une entrevue jeudi, le vice-président de Huawei Canada, Alykhan Velshi, a dit qu’il serait «imprudent et irresponsable» pour le gouvernement canadien de demander à l’entreprise de cesser de soutenir son équipement existant dans le réseau 5G, notant qu’il existe environ 10 000 sites de téléphonie cellulaire à travers Canada qui possède la technologie Huawei. 

Il a affirmé que davantage de conversations devaient avoir lieu entre Huawei et Ottawa.

ZTE a également fait part de ses réflexions sur la décision dans un communiqué disant que la société «rejette la proposition de cette annonce», la qualifiant de «hautement spéculative».

Au même moment, les États-Unis félicitent la décision du Canada d’interdire les technologies chinoises Huawei et ZTE de ses réseaux mobiles de nouvelle génération.