«Jacques Parizeau et son pays imaginé»: histoire d’un homme politique de conviction

MONTRÉAL — En salle depuis vendredi, le documentaire «Jacques Parizeau et son pays imaginé», de Jean-Pierre Roy et André Néron, se veut un hommage à la carrière politique de l’ancien premier ministre du Québec.

Ex-collaborateur politique de Mario Dumont, André Néron a voulu, par son long-métrage, inspirer à la fois les «futures générations de bâtisseurs» et les politiciens actuels.

«Trop souvent maintenant, certains politiciens – au lieu de devenir des porte-parole des citoyens envers les gouvernements – deviennent des porte-parole des partis politiques ou du gouvernement pour convaincre les citoyens. Pour moi, ce n’est pas ça, des convictions politiques», explique-t-il en entrevue.

L’idée d’un film sur la carrière de Jacques Parizeau avait d’abord germé dans son esprit en juin 2015, lors de la chapelle ardente tenue quelques jours après son décès.

«Je ne voulais pas faire un film où les gens envoient leurs condoléances, mais où on rendait hommage à un bâtisseur du Québec. (…) Je voulais m’assurer qu’on parle de M. Parizeau, mais de manière historique», précise le réalisateur.

Élaboré de façon chronologique, le documentaire rassemble une dizaine de témoignages de gens ayant connu «Monsieur», dont son attachée de presse Marie-Josée Gagnon, l’ancien président du Mouvement Desjardins Claude Béland, et l’historien Éric Bédard, qui a été adjoint au chef de cabinet du premier ministre Parizeau.

Jean Campeau, Yves Michaud, Jean-Claude Rivest ainsi que le sociologue Guy Rocher ont également témoigné de la dévotion du chef péquiste lorsqu’il était premier ministre, de septembre 1994 à janvier 1996.

«Je voulais donner une voix à ceux qui l’ont côtoyé de près et dans des situations différentes, autant fédéralistes que souverainistes, soutient André Néron. Je trouvais ça intéressant de parler avec des gens dont les allégeances politiques ne s’alignaient pas avec celles de M. Parizeau, ou encore avec des gens qu’on n’associe pas nécessairement au mouvement souverainiste».

Il ajoute que son but était de mettre de l’avant des gens moins visibles dans les médias et l’histoire politique récente, ce qui explique l’absence de certains «gros noms» à l’écran.

«On a aussi eu beaucoup de refus. On a voulu interviewer Lisette Lapointe qui au départ a dit oui, puis qui s’est ensuite retirée pour des raisons personnelles qu’on ne connaît pas», raconte le réalisateur Jean-Pierre Roy par rapport à la sélection des intervenants.

Le petit-fils du défunt, Hadrien Parizeau, est le seul membre de la famille qui a accepté de se prêter au jeu.

Le fameux discours de défaite

Parsemé d’images d’archives, le film traite également de la déclaration de Jacques Parizeau qui, après la défaite du «oui» au second référendum le 30 octobre 1995, avait blâmé «l’argent et (l)es votes ethniques».

Aux yeux d’André Néron, le premier ministre n’avait fait que «laisser parler son cœur», mais n’était «pas un raciste» pour autant.

«Quand j’ai vu la déclaration de M. Parizeau (…), j’étais le seul qui défendait ce qu’il venait de dire. Je disais : « ce qu’il vient de faire, c’est constamment ce que les maisons de sondage font constamment avant une campagne électorale ». Ils nous disent que les francophones vont voter de telle façon, les anglophones de telle façon, etc.», soutient le réalisateur.

Le témoignage de l’homme d’affaires Vincenzo Guzzo, qui dirige les Cinémas Guzzo, abonde dans le même sens. Le documentaire a d’ailleurs été produit en collaboration avec M. Guzzo, qui a fourni un soutien financier et a accepté que le film soit diffusé dans ses cinémas.

Pour les Québécois qui ont connu l’époque de Parizeau, le long-métrage se veut un retour en arrière «émotif» des grands moments de la politique québécoise. Les générations plus jeunes, elles, découvriront à travers le film un homme «hors pair et hors du commun», estime Jean-Pierre Roy.

«J’espère que beaucoup de Québécois et de Québécoises iront voir ce film et se rappelleront pourquoi ils votent, résume André Néron. (…) On doit revenir à des convictions : c’est ça, une belle démocratie, et M. Parizeau était un grand démocrate».

Cet article a été produit avec le soutien financier des Bourses Meta et La Presse canadienne pour les nouvelles.