La mairesse de Clarenceville démissionne

ACTUALITÉ – La mairesse de Saint-Georges-de-Clarenceville, Renée Rouleau, a annoncé qu’elle démissionnait lors de la dernière séance publique de la MRC du Haut-Richelieu, le 8 juillet. Elle a quitté ses fonctions le 13 juillet.

La principale raison qui explique sa démission est la décision du conseil municipal d’approuver une dépense de 400 000 $ pour paver un tronçon de route, plongeant la municipalité dans un déficit. Elle s’est opposée à cette décision qui fragilise la santé financière de la municipalité, dit-elle.

«Il m’est devenu impossible de cautionner les décisions de mon conseil municipal ni de défendre ces décisions, a-t-elle déclaré aux autres maires présents lors de la séance de la MRC. Cela va à l’encontre de mes valeurs. Mes valeurs, c’est écouter et servir en toute transparence l’intérêt de tous les citoyens de Clarenceville, avec une vision de l’avenir pour notre municipalité. C’est aussi une saine gestion des affaires municipales. Depuis 2013 la municipalité était super bien gérée au niveau des finances.»

Pas une priorité

Le tronçon de route qui a été pavé est le chemin Wolfridge, un cul-de-sac qui donne accès à six maisons et quelques fermes, «où habite un des conseillers», précise Mme Rouleau, dans un communiqué de presse qu’elle a fait parvenir aux médias.

Les travaux sur ce tronçon, d’une longueur d’un peu moins de deux kilomètres, ont été exécutés en juin 2019.

Mme Rouleau convient qu’il y avait un problème de poussière sur ce chemin qui n’était pas pavé, mais elle estime qu’il avait été en partie réglé lors de travaux de pavage d’une valeur de 700 000 $, qui avaient été exécutés sur une distance de trois kilomètres, il y a quelques années.

«Je n’avais pas de problème avec ce projet en 2018, à condition qu’on ait une subvention, convient Mme Rouleau. Au final, on a mis 1,1 M$ sur ce chemin de 4,8 kilomètres. La partie qui n’était pas encore faite n’était pas prioritaire parce qu’on a plusieurs autres chemins qui sont plus prioritaires. On a 1100 payeurs de taxe à Clarenceville. Ces travaux sur Wolfridge reviennent à 1000 $ par contribuable.»

Déficit

«En janvier 2019, nous avions un surplus de 500 000 $ et au 1er janvier 2020, on avait un déficit de 350 000 $, sur un budget de 2,2 M$, dit Mme Rouleau. Les sept dernières années de saine gestion de mon mandat ont été simplement annihilées. Nos surplus sont anéantis. Il n’y avait pas eu d’augmentation de taxe depuis que j’étais en poste et on avait tout payé nos dettes.»

Cette dépense de 400 000 $ venait s’ajouter à d’autres importantes dépenses qui devaient être faites en 2019, comme l’achat d’un camion pour la voirie au coût de 260 000 $ ou la mise en état de l’abri à sel au coût d’environ 80 000 $.

«Cette dépense s’est faite à même notre budget, déplore Mme Rouleau. Nous étions censés avoir une subvention, mais nous ne l’avons pas eue. Il n’y a pas eu de règlement d’emprunt. Un règlement d’emprunt implique une consultation publique. Les citoyens auraient dit non. Ils n’ont pas consulté les citoyens. Ils ont plutôt utilisé nos surplus accumulés. Cela témoigne d’un manque de transparence notable.»

Selon elle, il est essentiel d’avoir recours au règlement d’emprunt pour financer de tels projets, de manière à être équitable entre les citoyens, mais aussi pour être équitable dans le temps, entre les générations, plutôt que de tout payer d’un seul coup et d’endetter la municipalité.

Conséquences

Ce déficit aura d’importantes conséquences dans les années à venir, pense Mme Rouleau.

«D’une part, il devra être refilé en taxes aux citoyens, car une municipalité n’a pas le droit de faire de déficit, dit-elle. Cela prendra des années avant de reconstruire un fonds de réserves pour les imprévus et les urgences.»

Elle craint aussi que le conseil municipal soit contraint de reporter certains projets d’importance comme l’agrandissement ou le déménagement de la caserne de pompiers ou encore la deuxième phase de rénovation du centre communautaire.

Je quitte pour des raisons d’intégrité.

-Renée Rouleau, mairesse démissionnaire de Clarenceville

D’importants travaux d’aqueduc doivent être exécutés dans les années à venir. Cela implique que certaines routes devront être reconstruites. «Ils veulent enlever les trottoirs dans le village parce qu’il n’y a plus d’argent. C’est n’importe quoi!», conteste Mme Rouleau, qui désapprouve cette orientation du conseil.

Valeurs

La mairesse démissionnaire reproche au conseil plusieurs autres décisions qu’il a prises, parce qu’elles vont à l’encontre de ses valeurs.

«Il y a un noyau dur, deux ou trois conseillers, qui sont davantage préoccupés par leurs problèmes de voisinage, qui ont réussi à rallier deux autres conseillers et ils forment la majorité au conseil, affirme-t-elle. Je me suis retrouvée toute seule. On m’a isolée.»

«Les conseillers m’ont rencontrée en septembre 2019 pour me dire que je n’étais pas capable de travailler en équipe, raconte Mme Rouleau. Un voulait un lampadaire, ils voulaient augmenter leur salaire… J’ai mes valeurs et ça ne me rejoint pas. C’était un putsch, mais j’ai décidé de continuer à défendre l’intérêt des citoyens. Je veux bien travailler en équipe, mais je ne mettrai pas de côté l’intérêt des citoyens et la saine gestion de la municipalité pour travailler en équipe.»

Intimidation

Mme Rouleau déplore aussi l’intimidation et le harcèlement dont elle est victime.

«Je subis de l’intimidation, du dénigrement et des accusations sans fondement, qui dépassent le simple jeu politique», poursuit-elle.

«On a mis un cœur de chevreuil fraîchement éviscéré sur mon terrain à l’automne 2019, dénonce Mme Rouleau. Je ne sais pas qui a fait ça, mais j’ai appelé la police et je l’ai dénoncé publiquement.»

«Je quitte la fonction de mairesse avec un sentiment de tristesse et de déception, certes, mais je demeure fière des accomplissements et des réussites que nous avons pu réaliser ces sept dernières années, conclut-elle. Clarenceville est certainement mieux connue maintenant pour ses qualités, les talents de ses citoyens et ses atouts.»