Profession: maréchal-ferrant

PORTRAIT – Philippe Provencher pratique le métier de maréchal-ferrant depuis quatre ans. Il n’a que 26 ans, mais les nombreux obstacles qui se sont dressés le long de son parcours auraient pu le faire sombrer. C’est la découverte de l’univers de la maréchalerie qui lui a permis de devenir la personne qu’il est aujourd’hui: vif, connaissant et passionné. On ferre les chevaux depuis 2000 ans, mais Philippe Provencher raconte comment, aujourd’hui, ce magnifique métier lui a permis de trouver sa voie. 

Nous avons rencontré Philippe Provencher à la ferme Allardyce Farm, qui appartient à la famille de sa conjointe, à Hemmingford, où il s’occupe d’une trentaine de chevaux.

Le travail de maréchal-ferrant consiste à déferrer le cheval, nettoyer les sabots, les trimer, forger les fers, ferrer l’animal à nouveau, puis faire la finition, c’est-à-dire limer les clous et à s’assurer qu’aucune partie des fers ne puissent le blesser.

«Le monde des chevaux nous ramène les deux pieds sur terre, confie M. Provencher. Ça te rend humble. C’est un peu comme avoir un enfant. Ça m’a remis sur la bonne voie. Je viens d’une bonne famille, mais ça aurait pu mal tourner. Il fallait que je me perde pour que je me retrouve, sans savoir que j’allais faire ça de ma vie.»

Plus jeune, M. Provencher habitait sur une ferme, où sa famille gardait sept chevaux, mais rien ne le prédestinait à ce métier. Les années ont passé puis il s’est éloigné de la ferme. Il a abandonné le secondaire, avant de fonder une entreprise de livraison à domicile pour des chaînes de restauration rapide qui n’offraient pas ce service. Il a fait cela pendant trois ans avant de quitter ce domaine et de se retrouver devant rien.

Passion

Un jour, une connaissance de sa mère cherchait un endroit où héberger ses chevaux. L’écurie familiale était vide et Philippe Provencher s’est offert pour aménager les lieux en échange de quoi, il pouvait monter les chevaux.

Plus tard, il s’est trouvé un autre emploi, dans une écurie de 150 chevaux, à Saint-Paul-de-Joliette. «Ça m’a donné beaucoup d’expérience, dit-il. Quand le maréchal-ferrant venait, je devais tenir le cheval. J’ai tenu des chevaux comme ça pendant un an. J’ai tout de suite compris que c’est ce que je voulais faire.»

L’école n’était pas faite pour Philippe Provencher, mais sa détermination lui a permis de se frayer un chemin dans ce milieu.

«Il faut que tu sortes de ta zone de confort si tu veux grandir, pense-t-il. Ce n’est pas en faisant les mêmes choses tous les jours qu’on peut s’attendre à ce que de nouvelles choses arrivent. J’ai sorti la liste de tous les forgerons membres de l’Association des maréchaux-ferrants du Québec et je les ai appelés jusqu’à ce que je tombe sur Éric Surprenant, qui est mon mentor aujourd’hui. Je suis choyé parce que quand je l’ai appelé, j’avais zéro expérience.»

Conseil

Philippe Provencher a eu la chance de trouver ce mentor avec qui il travaille trois jours par semaine.

«Tu dois suivre un mentor pendant trois ou quatre ans, suggère M. Provencher. Quand j’ai commencé, je déferrais les chevaux et les nettoyais. Ça m’a permis d’apprendre à reconnaître les parties du pied. Il faut que je vois et que je touche pour apprendre.»

Maintenant qu’il a découvert sa passion, Philippe Provencher se plonge dans les livres pour en connaître davantage sur l’anatomie du cheval et perfectionner sa technique. Il a même eu l’opportunité de disséquer des pattes de cheval, avec l’aide de sa mère, qui est chirurgienne.

Éric Surprenant a accepté d’être le mentor de Philippe Provencher. Il pratique la maréchalerie depuis 1994. On le voit ici en compagnie de Useful, le cheval de la conjointe de M. Provencher.

Métier

Il est possible de très bien gagner sa vie comme maréchal-ferrant. Les fers des chevaux devant être changés ou modifiés aux cinq à six semaines, il suffit de se constituer une banque de clients suffisante pour s’assurer de travailler à l’année. C’est ce que Philippe Provencher fait. Il trimbale sa forge et son enclume dans la boîte de sa camionnette et il fait la tournée de ses clients à intervalles réguliers.

«L’idéal, c’est de faire de six à dix chevaux par jours, cinq jours par semaine, pense M. Provencher. Parfois, on fait le ferrage complet ou simplement une taille des sabots.»

Au niveau de la maréchalerie, on peut en connaître beaucoup, mais tant et aussi longtemps que cette bête-là ne nous parlera pas, il y a encore beaucoup à apprendre d’elle.

Philippe Provencher, maréchal-ferrant

Physique

Le métier de maréchal-ferrant est exigeant pour le corps, le dos principalement. Il faut tenir les pattes de l’animal lorsque l’on travaille sur le pied. Le maréchal-ferrant se retrouve souvent en position courbée.

«Ça garde en forme, lance M. Provencher. Si tu manges une poutine et que tu te penches en deux pour ferrer, c’est vraiment difficile!»

Est-ce un métier dangereux ? «Ça peut l’être, mais à force de travailler, on apprend à se placer pour que ce soit sécuritaire, affirme M. Provencher. Ça peut brasser un peu. Ça demande beaucoup de concentration. On doit être patient quand il fait chaud, le cheval peut être agité, il y a des mouches et c’est inconfortable.»

Selon lui, l’attention, l’écoute, la minutie et l’observation sont les principales qualités requises pour exercer ce métier. «L’observation, c’est 80 % de la job», affirme M. Provencher.

Bien-être

M. Provencher rappelle que le ferrage des chevaux n’est pas douloureux pour l’animal. Bien que certains puristes soient contre cette pratique, il n’en reste pas moins que l’animal a parfois besoin de ce support, estime M. Provencher.

«Je pense que si tu peux garder ton cheval nus pieds et que ses pieds sont sains, garde-le comme ça, précise-t-il. Mais s’il fait de la compétition, fers-le.»