Denis Gauthier, un sculpteur de Saint-Jacques-le-Mineur: l’homme qui sculptait des chevaux en bois

ART – Denis Gauthier sculpte depuis qu’il est enfant. Retraité depuis une quinzaine d’années, il a entrepris de faire revivre l’art populaire québécois des années 1850 à 1910 en reproduisant des chevaux de bois à bascule ou à roulettes que l’habitant gossait au coin du feu l’hiver venu.

Le résident de Saint-Jacques-le-Mineur est le seul artisan en son genre au Québec. Il a pratiquement tout reproduit ce qu’on trouve dans les musées ou les livres d’antiquité.

Le nom de son atelier, La blanche semaine, est tiré d’une chanson de Gilles Vigneault sortie en 1963 et intitulée L’hiver. Le chanteur fait référence au moment où ces œuvres étaient créées lors de périodes de grand froid, quand la neige était abondante.

«Dans les campagnes, les gens étaient pauvres, explique M. Gauthier. Le Québec était replié sur lui-même, sans radio ni télévision. Les hommes travaillaient dehors du matin au soir et les femmes élevaient les enfants. La semaine blanche, c’est ce moment où le père avait un premier contact avec ses enfants. Avant, il les faisait. Là, il les voyait. Il avait le temps de prendre une bûche et de sculpter un jouet.»

C’est la naïveté de ces œuvres d’art du quotidien qui touche M. Gauthier.

«Ces gens n’ont pas eu de formation en art, mais ils avaient besoin de créer. Souvent, aller dans les écoles d’art, ça met un frein. Tu connais les grands maîtres et tu te dis que tu n’es pas à la hauteur.»

Cheval

Si M. Gauthier sculpte principalement des chevaux, c’est d’abord parce qu’il les aime. Il en a possédé pendant une trentaine d’années. C’est aussi pour ce qu’ils représentent.

«Le cheval a toujours été l’objet de grands soins et de fierté, explique-t-il. Il accompagnait l’habitant dans toutes ses activités et faisait l’objet d’orgueil et de discussions très passionnées.»

L’artiste rappelle que les premiers chevaux sont arrivés au Québec en 1665. Il y en a eu 83 entre 1665 et 1671, précise-t-il. Le cheval est vite devenu ce que la voiture représente de nos jours.

«Aujourd’hui, si tu n’as pas d’auto, tu es dans la misère», illustre-t-il.

Une loi adoptée en 1710 interdisait aux chevaux de galoper ou de trotter à moins de cinq arpents des clochers d’église pour éviter les accidents, raconte le sculpteur. Les grelots placés sur le cheval permettaient de les entendre venir. C’était en quelque sorte le klaxon de l’époque.

«Les jeunes avaient souvent un traîneau rouge et les plus vieux en avaient un noir. Ça n’a pas changé», souligne M. Gauthier.

L’artisan offre aux municipalités d’exposer ses œuvres.

«Quand je fais une exposition, il n’y a rien à vendre, précise-t-il. C’est juste pour montrer les œuvres. C’est un morceau de notre histoire et il ne faut pas que ce soit oublié.»

 

Retour à ses origines

Originaire de Saint-Ubalde, M. Gauthier s’est installé à Saint-Jacques-le-Mineur en 1978. Il est en quelque sorte revenu à ses racines, puisque son arrière-grand-père, Hilaire Bourdon, est originaire de Sherrington.

Après avoir fait des études à l’Institut des arts appliqués de Montréal, il a entrepris une carrière de designer. Il a notamment travaillé pendant 25 ans pour Hydro-Québec. Il aménageait les bâtiments en fonction de leur usage, que ce soit des bureaux, des entrepôts ou des ateliers de travail.

À sa retraite, il a décidé de se consacrer à faire revivre des œuvres d’art populaire du passé en alliant ses deux passions: la sculpture et les chevaux.

M. Gauthier a toujours sculpté. «Ma grand-mère m’a donné un couteau à 6 ans», se souvient-il.

L’élément déclencheur de sa passion pour la sculpture d’animaux lui vient de Wilfrid Richard, un vieil homme un peu ermite qui habitait près de chez lui. Un jour, son cousin l’amena le voir. Dans la salle de bain, il y vit plusieurs petits animaux de bois sculptés.

«J’ai figé là !» se souvient M. Gauthier.

Il y est retourné à plusieurs reprises pour aider M. Richard à cirer ses petits oiseaux de bois.

Aujourd’hui, les œuvres de M. Richard sont dans les musées, dont le Musée québécois de culture populaire à Trois-Rivières. Le Musée de la civilisation de Québec a même fait paraître un livre catalogue portant sur son œuvre. Un monde peuplé d’animaux est paru en 1987.

À la recherche de nouveaux modèles de chevaux

Denis Gauthier est toujours à la recherche de nouveaux modèles de chevaux anciens à reproduire. Il invite les gens qui en ont à communiquer avec lui. On peut le joindre par courriel à l’adresse lablanchesemaine@gmail.com.