Manque de sommeil: l’exercice protégerait la mémoire

MONTRÉAL — L’impact négatif d’un manque de sommeil sur la mémoire semble moindre chez les gens qui ont une bonne santé cardiorespiratoire, indique une étude publiée par des chercheurs de l’Université McGill.

Le mécanisme protecteur qui pourrait être en jeu n’est pas clair, et on ne peut pas non plus évoquer un lien de causalité entre une bonne santé cardiorespiratoire et une meilleure mémoire en cas de manque de sommeil, mais la piste est néanmoins intrigante, estiment les auteurs de l’étude.

«On remarque vraiment une tendance globale vers la privation de sommeil, malheureusement, donc il est important de trouver des stratégies qui pourraient potentiellement sauver certains aspects de la cognition, incluant la mémoire», a dit Béatrice Ayotte, une étudiante à la maîtrise sous la direction du professeur Marc Roig, de l’École de physiothérapie et d’ergothérapie de McGill.

Mme Ayotte, M. Roig et leurs collègues ont recruté 29 jeunes participants en santé pour leur étude. Dix-neuf d’entre eux ont été privés de sommeil pendant 30 heures consécutives, puis on leur a demandé de mémoriser 150 images. Les dix autres ont pu dormir normalement avant de voir les images.

Quatre jours plus tard, le groupe privé de sommeil a éprouvé plus de difficultés à se souvenir des images, comparativement à l’autre groupe.

En revanche, les sujets du groupe privé de sommeil qui avaient la meilleure santé cardiorespiratoire (telle que mesurée sur un vélo stationnaire) ont offert une meilleure performance que les autres membres de ce groupe.

«C’est seulement quelque chose qu’on a pu voir, en fait, dans le groupe qui était privé de sommeil, a dit Mme Ayotte. On n’a pas vu cette association-là dans le groupe qui n’était pas privé de sommeil. Donc ça nous indique que quand on est privé de sommeil ou qu’il y a une atteinte à la mémoire, (…) que le fait d’avoir une meilleure santé cardiorespiratoire pourrait avoir un effet protecteur sur la mémoire.»

Cette corrélation n’implique toutefois pas une causalité, précise-t-elle. En d’autres mots, il est impossible d’affirmer, sur la base de cette étude, qu’une bonne santé cardiorespiratoire protège la mémoire en cas de privation de sommeil.

Il est possible, ajoute Mme Ayotte, que les sujets privés de sommeil qui avaient la meilleure santé cardiorespiratoire aient aussi eu de meilleures habitudes de vie, comme une meilleure alimentation ou une meilleure gestion de leur stress, et que ce soit l’un de ces facteurs, ou l’ensemble de ces facteurs, qui ait protégé leur mémoire.

Les participants à l’étude avaient aussi été privés de sommeil pendant une seule nuit, souligne-t-elle. On ne peut donc pas savoir si le même effet protecteur serait observé chez des gens qui sont privés de sommeil de manière chronique.

«Mais d’avoir pu observer cette corrélation-là est encourageant», a-t-elle dit. Cela pourrait potentiellement être pertinent pour les gens qui souffrent de troubles du sommeil ou pour ceux qui doivent effectuer des tâches critiques en dépit d’horaires irréguliers, comme les pilotes ou les médecins.

Il ne faudrait par contre pas en conclure que «l’exercice physique peut remplacer le sommeil», a conclu Mme Ayotte. «Le sommeil est important pour plusieurs autres choses, pas seulement pour la mémoire. Il ne faut pas remplacer le sommeil par l’exercice.»

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical Medicine & Science in Sports & Exercise.