Ottawa lance une consultation publique sur la protection de la biodiversité

MONTRÉAL — Les Canadiens sont appelés à donner leur point de vue sur ce que le pays doit faire pour protéger la biodiversité et atteindre les objectifs de l’accord signé lors de la COP15 à Montréal, qui comprennent la protection de 30 % des aires terrestres et marines d’ici 2030.

Le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, a donné le coup d’envoi aux consultations publiques sur la Stratégie 2030 pour la biodiversité du Canada, lundi matin à Montréal.

Les pays signataires de l’accord de Kunming — Montréal doivent présenter leurs plans pour la mise en œuvre du nouveau Cadre mondial de la biodiversité lors de la COP16, qui se tiendra en 2024.

Les Canadiens sont donc invités à «participer aux efforts de mobilisation qui se dérouleront au cours des prochains mois» et donner leur point de vue sur les priorités concernant la protection de la biodiversité.

«On ne peut pas espérer avoir une société prospère si cette prospérité-là se bâtit au détriment des conditions de vie sur terre, c’est aussi simple que ça. On ne peut pas espérer avoir une économie vibrante si cette économie-là se bâtit au détriment de la nature, de l’environnement et des conditions de vie pour l’ensemble des habitants de la planète, qu’ils soient humains, animal, végétal», a répondu le ministre Guilbeault lors d’un point de presse, à une question portant sur l’importance de cette consultation. 

«Des activités humaines ont eu un impact négatif sur la nature partout dans le monde, mettant en péril des écosystèmes irremplaçables et menaçant de disparition jusqu’à un million d’espèces, du jamais vu dans l’histoire de l’humanité», a indiqué le ministre en ajoutant que «plus de la moitié du produit intérieur brut mondial dépend de la nature» et «plus d’un milliard de personnes dépendent des forêts pour leur subsistance».

La consultation devrait durer deux mois et les Canadiens qui veulent participer sont invités à consulter en ligne le document «Vers une stratégie canadienne 2030 pour la biodiversité: Freiner et inverser la perte de nature».

Un projet de loi dans les prochains mois

Le ministre de l’Environnement souhaite présenter un projet de loi-cadre, qui intégrera les objectifs de la COP15 dans la loi canadienne, d’ici la fin de l’année ou au plus tard en 2024.

Il a rappelé que son équipe «a déjà commencé à travailler» sur un projet de loi.

«Nous avons une loi-cadre sur les changements climatiques qui prévoit des mécanismes de transparence, notamment la présentation de plans qui doivent être déposés au Parlement. Je pense que nous devons avoir le même genre de loi-cadre sur nos objectifs de biodiversité» et cette loi devra contenir «des objectifs mesurés, mesurables, pour nous amener jusqu’en 2050», a précisé Steven Guilbeault.

Le ministre faisait ainsi référence à la Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité qui obligera le gouvernement fédéral à fixer des cibles nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au Canada tous les cinq ans, à compter de 2030. Il doit également faire le rapport de ses progrès au Parlement à chaque étape.

«La Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité n’est pas parfaite, mais c’est un très grand pas alors si le gouvernement s’en inspire pour la biodiversité, c’est enthousiasmant», a souligné Melanie Snow, spécialiste des questions législatives pour Ecojustice.

«Ce gouvernement est très en retard sur ses engagements de protection de la nature. Des promesses non tenues de protéger la terre aux objectifs de plantation d’arbres manqués, leur bilan a été très décevant. L’adoption d’une nouvelle législation au cours de l’année prochaine serait toutefois un pas concret dans la bonne direction», a pour sa part indiqué Shane Moffatt de Greenpeace.

Il a ajouté que «près de 50 000 Canadiens ont signé notre pétition en faveur d’une telle loi» et que «pour éviter de répéter les erreurs du passé, il est temps d’adopter une nouvelle législation qui puisse tenir les gouvernements responsables de la protection de la biodiversité dont nous dépendons tous pour notre survie».

Des changements structuraux qui s’imposent

Des membres de la société civile, dont Nature Québec, avaient été invités à participer au lancement des consultations.

«Nous assistons et contribuons à la sixième extinction de masse» et «nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies», a indiqué Anne-Céline Guyon, chargée de projet experte pour le climat de Nature Québec.

Elle a souligné que cette «consultation est majeure et essentielle» et a demandé au ministre Guilbeault et à l’ensemble de l’appareil gouvernemental de faire preuve «d’un niveau d’ambition inégalé et d’être d’une cohérence sans faille».

L’atteinte des objectifs de protection de la biodiversité ne sera possible que si «des changements structuraux s’attaquent à nos manières de consommer, d’aménager le territoire, de produire notre nourriture et d’extraire les ressources naturelles», a fait valoir la représentante de Nature Québec.

Il est essentiel, selon Nature Québec et les autres organisations environnementales présentes lors de l’annonce, que la stratégie qui sera mise en place par le gouvernement fédéral mette à contribution «l’ensemble des ministères et des organismes publics et parapublics».

Pour mettre en place la protection de 30 % du territoire et atteindre les autres objectifs liés à la protection de la biodiversité, Ottawa compte sur les provinces, les territoires et les Premières Nations.

Les provinces et les territoires contrôlent d’ailleurs une partie importante des activités qui ont le plus d’impact sur les écosystèmes comme l’agriculture, la foresterie et le développement des ressources.