En Jean-Paul Chartrand père, Yvon Michel a perdu un grand ami et un complice

Le Réseau des sports n’avait pas encore été officiellement inauguré lorsque Jean-Paul Chartrand père et Yvon Michel se sont retrouvés une première fois ensemble pour enregistrer la télédiffusion d’un premier gala de boxe à la station en devenir. Ce fut la première de plus de 1000 émissions ensemble, mais aussi le véritable point de départ d’une amitié et d’une complicité hors de l’ordinaire qui a duré plus de 30 ans.

Le Réseau des sports a annoncé dimanche matin le décès de Chartrand père à l’âge de 92 ans.

Le paternel du journaliste et commentateur sportif Jean-Paul Chartrand fils, Chartrand père a été un pionnier de RDS. Il y a été embauché dès l’ouverture de la station en 1989, où il a couvert la boxe, mais aussi le football, en plus de participer à la production d’émissions de chasse et pêche.

Les amateurs de sport du Québec se souviendront surtout de tous ces combats de boxe, en provenance de tous les coins de l’univers, que Jean-Paul Chartrand père a décrits avec ferveur et enthousiasme, appuyé, en Yvon Michel, par les observations de l’un des grands experts de boxe au Québec.

«On a commencé le 2 septembre 1989 à enregistrer des émissions à RDS et on en a fait 1727», a précisé Michel lors d’une entrevue téléphonique à La Presse Canadienne environ une heure avant de participer à une émission en hommage à Chartrand que RDS lui a consacrée, en fin d’après-midi dimanche.

«Quand je fais des préparations, j’identifie l’émission tout le temps, le numéro de l’année, le nombre dans l’année et le nombre total. Donc, je sais que j’ai fait 1727 émissions avec lui donc en près de 34 ans», a-t-il ajouté.

«Jean-Paul, c’est comme un membre de la famille. Je l’ai vu toutes les semaines depuis 1989.»

Après ce premier enregistrement, un gala en provenance de l’hôtel Henri VIII à St. Louis, au Missouri, et que Michel a gardé, la chimie s’est rapidement installée entre les deux hommes.

Bien sûr, ils partageaient un grand amour pour la boxe, mais Michel a aussi découvert un homme passionné pas seulement du pugilat, mais aussi dans sa manière de vivre au quotidien.

«Jean-Paul, c’est un gars intelligent, curieux, un vrai pro qui sait comment mettre ses analystes en vedette. Ce n’est pas un gars qui a un gros ego, c’est un bon vivant, un gars qui aime la vie, qui aimait la vie et qui vivait aussi sans compromis, vraiment avec beaucoup, beaucoup de passion», a décrit Michel.

«Jean-Paul et moi, une émission, c’est comme deux ‘chums’ qui s’en allaient à la Cage aux Sports prendre une bière et regarder un show de boxe. C’était vraiment facile comme ça avec lui.»

À force de s’asseoir à ses côtés, Michel a aussi été en mesure de constater à quel point Chartrand père ne laissait rien au hasard en vue des galas de boxe que RDS allait diffuser.

«De la première à la dernière (émission), Jean-Paul s’est toujours préparé avec le même soin pour être certain de ne rien manquer, d’être fin prêt. Ça m’a toujours énormément impressionné.»

Michel a d’ailleurs revu ce trait de la personnalité de Chartrand lorsque celui-ci a été intronisé au Panthéon des sports du Québec.

C’était le 6 novembre. Ce soir-là, affirme Michel, Jean-Paul Chartrand père «pétait le feu» et il a «volé le show pendant la soirée».

«Au Panthéon des sports, il s’était préparé un discours de quatre ou cinq pages et il ne l’a même pas ouvert. C’est un gars qui se prépare énormément. Mais du moment où il est préparé, il n’avait pas besoin de son matériel.»

Deux jours plus tard, Chartrand père et Michel ont enregistré une émission qui allait devenir leur dernière ensemble.

Au fil des ans, Michel a toujours vu un collègue en pleine possession de ses moyens.

«Sa voix était pur cristal. Pas d’hésitation. Il a été ‘sharp’ tout le temps, jusqu’à la dernière émission. Il avait l’esprit vif, il était allumé, sa voix était juste et sûre», a-t-il décrit.

Michel estime aussi que Chartrand, dans son rôle de descripteur, a aidé à promouvoir la boxe professionnelle.

«Avec tout ce qu’il a fait, il a contribué à faire connaître le sport, à le vulgariser, à le faire comprendre. Il a contribué à l’éducation générale des Québécois à la boxe professionnelle.»

Selon Michel, les problèmes de santé de Chartrand ont commencé peu de temps après sa cérémonie d’intronisation au Panthéon des sports du Québec.

«La dernière fois que je l’ai vu, c’était la semaine dernière à l’hôpital», a confié Michel tout en précisant qu’il avait passé environ une heure avec lui.

«Il m’a encore fait des blagues. Il m’a aussi demandé comment allait ma conjointe, comment allaient mes enfants. On s’est serré la main et je lui ai dit ‘Jean-Paul, tu vas t’en sortir’».

Michel a appris la nouvelle du décès de Chartrand dimanche matin. Quelques jours plus tôt, il avait été avisé que l’état de santé de son bon ami s’était dégradé.

«Sur le coup, même si tu t’y attends, ça donne quand même un choc. Mais Jean-Paul haïssait les pleurnichards. Je me suis dit ‘dans le fond, il faut que je me contienne’. Je vais essayer de l’honorer, mon vieux chum, et de lui faire honneur jusqu’au bout.»

Écrit, radio, télé

Chartrand a connu une longue carrière dans les médias à partir de la fin des années 1950.

Il a commencé dans le monde des médias à la radio CJMS, puis a fait le saut chez CKAC.

Il a aussi travaillé à l’écrit au Journal de Montréal, au Montréal-Matin et au Dimanche-Matin durant les années 1960, 1970 et 1980, couvrant notamment les activités des Alouettes et du Canadien.

Chartrand a également œuvré à la télévision de Radio-Canada lors de la présentation de matchs de football de la NFL.