Dépôt du projet de loi 88: le vin québécois sera en vente dans les épiceries
Économie – Le vin, mais aussi le cidre, le vin de glace et l’hydromel fabriqués au Québec seront vendus dans les épiceries et les dépanneurs. Les vignerons québécois se réjouissent de cette nouvelle qu’ils attendent depuis… 30 ans.
Attendu depuis plusieurs mois, le projet de loi a été déposé à l’Assemblée nationale le 3 décembre par le ministre des Finances Carlos Leitao.
Ainsi, ce projet de loi prévoit que tous les détenteurs d’un permis de production artisanale pourront vendre leurs produits dans les épiceries et les dépanneurs. Cela ne s’applique pas aux alcools et aux spiritueux ni aux produits présentant plus de 16% d’alcool par volume.
Ce projet de loi prévoit aussi la création d’un nouveau permis, celui de coopérative de producteurs artisans, qui autorise la fabrication et l’embouteillage d’alcools et de spiritueux. Cela permettra notamment aux vignerons de distiller leurs résidus de fermentation pour en faire de l’eau-de-vie, comme la grappa italienne, par exemple.
Ces alcools et spiritueux devront être analysés par la Société des alcools du Québec (SAQ) ou par un laboratoire reconnu par la SAQ.
Enfin, les producteurs artisanaux de bière ne sont pas en reste puisque les consommateurs pourront acheter leurs produits sur les lieux de fabrication et les emporter.
Marché
Les vignerons sont très heureux du dépôt du projet de loi 88. «Ça donne l’option aux petits vignerons de sortir de leur vignoble et de fournir leur marché local dans un premier temps», explique Yvan Quirion, propriétaire du Domaine Saint-Jacques à Saint-Jacques-le-Mineur et président de l’Association des vignerons du Québec.
Dès que le projet de loi sera adopté, les vignerons pourront négocier la vente de leurs produits de gré à gré avec les épiceries et les dépanneurs.
Cela permettra aux producteurs de dégager un meilleur profit qu’en passant par la SAQ. «Les prix affichés par la SAQ sont environ trois fois le prix qu’elle a payé aux producteurs, explique Yvon Roy, copropriétaire du Vignoble Morou, à Saint-Cyprien-de-Napierville, qui se réjouit de cette annonce. Cela nous donne accès à près de 8000 points de vente et à notre prix. La SAQ en offrait un peu plus de 400.»
Ce n’est pas une mince tâche de faire connaître le vin québécois, dans un contexte où l’offre est immense. «On est l’endroit où il y a le plus de compétition chez soi, au monde, affirme M. Quirion. On retrouve 15 000 vins étrangers à la SAQ et dans les épiceries, dont la plupart sont subventionnés. Nous sommes dans un marché détenu à 99% par les vins étrangers. C’est unique au monde d’avoir autant d’offre.»
Production
Selon M. Roy, grâce à ces nouvelles mesures, les vignobles québécois sont appelés à grandir dans les années à venir. «En ce moment, on produit ce qu’on peut produire, mais quand tu n’as pas de marché, est-ce que tu pousses ta production?, demande M. Roy. On va planter dans nos vignobles. On va sûrement manquer de stock, prévient-il. C’est un beau problème.»
M. Quirion partage cette opinion. Selon lui, les vignobles québécois vont inévitablement prendre de l’expansion. On consomme 220 millions de bouteilles de vin par année au Québec, explique-t-il. De ce nombre, seulement deux millions de bouteilles sont produites au Québec. «On estime qu’en 2024-2025, nous aurons besoin de sept à dix millions de bouteilles fabriquées au Québec, par année», soutient M. Quirion.
M. Quirion croit qu’il revient maintenant aux vignerons de valoriser leurs produits. Certains mythes devront aussi être déboulonnés, dont celui selon lequel les vins québécois seraient dispendieux. «La moyenne de prix à la SAQ est de 15,80$ et on est là, dit M. Quirion. Le prix moyen des vins québécois est d’environ 16$. L’avantage, c’est que le client peut venir valider ce que les vignerons font dans le champ et c’est de l’achat local.»
Apport du député
Rappelons qu’un projet de loi similaire avait été présenté par le député de Huntingdon Stéphane Billette, en 2013. Il était cependant mort au feuilleton avec le déclenchement des dernières élections provinciales.
M. Billette a participé à l’élaboration de ce nouveau projet de loi en relayant les informations venant des nombreux producteurs que compte la région. «Depuis 2013, je rencontre de nombreux producteurs d’alcools québécois, dans le cadre de tournées provinciales, afin d’entendre leurs préoccupations et il me fera plaisir de continuer à recueillir leurs commentaires tout au long du processus législatif», déclare M. Billette.
L’industrie du vin dans notre région
Le territoire couvert par le Coup d’œil compte dix vignobles. Un onzième est en processus d’obtention de son permis. On y retrouve aussi quatre cidreries. Même Les Fraises Louis Hébert (Saint-Valentin) ont leur alcool: Le Valentin, une mistelle de fraise et de framboise. L’entreprise Vignobles Saint-Rémi (Saint-Rémi) ne produit pas de vin, mais du raisin pour les vignerons du Québec. Il s’agit du plus important viticulteur de la province.
Les vignobles
– Vignoble Angell (Saint-Bernard-de-Lacolle)
– Vignoble Morou (Saint-Cyprien-de-Napierville)
– Vignoble LeRoyer Saint-Pierre (Saint-Cyprien-de-Napierville)
– Domaine Saint-Jacques (Saint-Jacques-le-Mineur)
– Domaine des Salamandres (Hemmingford)
– Vignoble Le Chat botté (Hemmingford)
– Domaine Clos Saint-Bernard (Saint-Bernard-de-Lacolle)
– Vignoble Le Prieuré Lafrance (Saint-Jacques-le-Mineur)
– Vignoble 1292 (Saint-Blaise-sur-Richelieu)
– Vignoble Émile-Auguste (Saint-Bernard-de-Lacolle)
– Les Vignes des Bacchantes (Hemmingford)
Les cidreries
– La Face Cachée de la Pomme (Hemmingford)
– Vergers écologiques Philion (Hemmingford)
– Cidrerie Pomiverde (Hemmingford)
– Cidrerie du Minot (Hemmingford)
Quelques statistiques…
12 000
On compte environ 12 000 cépages différents dans le monde.
60
On produit une soixantaine de cépages au Québec, mais une dizaine d’entre eux occupent 80% des surfaces cultivées.
80 M$
Ce sont les retombées économiques de l’industrie québécoise du vin.
5
Nombre d’hectares moyens des vignobles québécois.
Source: Association des vignerons du Québec