Érablière le Blairfindie: pour l’authenticité des cabanes à sucre d’autrefois

PORTRAIT – Avec ses recettes qu’on se passe d’une génération à l’autre, sa forte identité familiale et son décor rappelant le Québec d’autrefois, l’érablière Le Blairfindie offre un voyage dans le temps des sucres traditionnel à sa clientèle depuis une quinzaine d’années à Saint-Blaise-sur-Richelieu. Incursion dans l’univers de Gaétan Delisle et Christine Rhéaume, les propriétaires des lieux.

Leur adresse se passe aux bouches à oreilles comme un secret bien gardé. Le couple de retraités, qui offre ses victuailles sur fins de semaine seulement, n’a pas besoin de publicité pour remplir sa salle à manger chauffée au poêle à bois. À lui seul, le jambon cuit dans la mie de pain, la recette de l’ancien boulanger de Saint-Blaise, fait la renommée de l’établissement.

Avant d’y goûter, il faut d’abord trouver les lieux qui sont à l’opposé du Mont-Saint-Grégoire, là où les rangs se croisent au milieu des champs agricoles. L’érablière n’est pas visible de la route principale.

Une fois à la bonne adresse, il faut passer entre la maison des propriétaires et celle de leur fils, emprunter un chemin de terre et parcourir un peu moins d’un kilomètre en pleine forêt. À la faveur d’une éclaircie, le bâtiment et tout son cachet authentique nous sautent aux yeux.

Beaucoup de cachet

Chacune de ses planches semble avoir une histoire à raconter même si la sucrerie a été érigée à la fin des années 90.

«Nous l’avons construite avec le bois de cinq granges de la région que nous avons démantelées. Elles ont été détruites lors de la crise du verglas. En un été, mon ami Joe Brennan et moi l’avons bâtie comme l’ont fait nos ancêtres. Nous avons utilisé des câbles pour monter les poutres, des marteaux et des clous», précise Gaétan Delisle, un policier retraité de la Gendarmerie royale du Canada.

À ses côtés, sa conjointe précise que l’idée au départ n’était pas d’y inviter des clients. «Nous aimons recevoir, explique Christine Rhéaume. Nous avons construit l’érablière pour organiser des rencontres de famille et d’amis. Ce n’est pas rare qu’on soit une soixantaine lors de ces réunions.»

Ce n’est qu’au milieu des années 2000 que le couple a ouvert ses portes aux visiteurs dans le but de préparer tranquillement sa retraite.

Au début, on rassemblait les gens en bordure de la route principale et on les transportait en chariot. Une fois sur place, le voyage dans le temps allait jusqu’à la toilette sèche extérieure. Celle-ci est d’ailleurs toujours là, mais une alternative moderne, quoiqu’un peu rustique, est maintenant offerte.

«Nous l’avons construite avec le bois de cinq granges de la région que nous avons démantelées. Elles ont été détruites lors de la crise du verglas. En un été, mon ami Joe Brennan et moi l’avons bâtie comme l’ont fait nos ancêtres. Nous avons utilisé des câbles pour monter les poutres, des marteaux et des clous.»

Gaétan Delisle

Antiquités

L’atmosphère d’antan se transporte à l’intérieur, où l’attention est immédiatement attirée vers quatre poêles à bois qui diffusent une chaleur réconfortante dans la pièce.

À l’entrée, le poêle à deux-ponts date de 1820 et pèse 738 livres. Le poêle de gare, au centre de la salle à manger, chauffe les lieux comme on le voyait à l’époque dans les écoles ou les magasins généraux. Non loin, le poêle de chauffage en fonte des forges du Saint-Maurice est unique avec ses pattes de lion. Un poêle de cuisine, recouvert d’émail, complète l’ensemble.

Les yeux se portent ensuite vers le plafond, où Gaétan Delisle expose son impressionnante collection d’antiquités. Avec les visiteurs, le bon vivant s’amuse à raconter l’histoire derrière le godendard, la sciotte ou la tranche à foin. Il leur demande d’identifier la fendeuse à bûche, le joug à seaux ou encore la chaudière à charbon. Plusieurs de ses items proviennent de l’ancien centre d’interprétation <I>Il était une fois une petite colonie<I> qui présentait la vie des anciens colons à L’Acadie.

Cuisines

Pendant ce temps, Christine Rhéaume s’active dans les cuisines avec ses trois enfants. Celle qui a fait carrière en secrétariat prépare des délices qui invitent à l’excès: soupe aux pois, cretons maison, fèves au lard au sirop d’érable, bacon fumé, oreilles de crisse, patates rissolées, omelettes, marinades et son fameux jambon.

Lorsque la nourriture est prête, Gaétan Delisle sonne sa cloche, un vrai instrument ayant appartenu à une maîtresse d’école de la région. «C’est le signal. Les clients peuvent se lever et venir au comptoir. On ne fait pas le service. Les gens en prennent tant qu’ils veulent», souligne Christine Rhéaume.

Il faut se garder de la place pour le dernier couvert qui comprend un gâteau nappé d’une sauce crémeuse à l’érable, la tarte au sucre, les grands-pères et la tire sur la neige.

Eau d’érable

Jusqu’en 2016, l’eau d’érable a été récoltée sur la terre familiale. Jusqu’à 200 arbres ont été entaillés par saison. La bouilloire est toujours là, à l’intérieur d’un cabanon adjacent à l’établissement, mais elle ne sert plus.

«Normalement, nous avons toujours fait notre sirop selon la méthode traditionnelle, mais cela demande beaucoup de temps et d’énergie au quotidien», indique l’homme de 68 ans, qui a été maire de Saint-Blaise-sur-Richelieu de 1995 à 1997.

Les enfants du couple étant à l’âge adulte et menant leurs carrières respectives n’ont pas autant de temps pour donner un coup de main à leurs parents. Déjà, ils font preuve d’une grande générosité en aidant aux fourneaux les samedis et dimanches.

«Nous nous approvisionnons chez un voisin qui fait lui-même la collecte, précise Christine Rhéaume, 66 ans. Le sirop est vraiment bon et il provient de notre région.»

Places limitées

Comme il n’y a que 120 places dans la salle à manger, les visiteurs doivent réserver leur siège. Cela permet à la cuisinière de préparer ses portions et éviter le gaspillage.

Il y a trois services seulement par semaine: le dîner et le souper le samedi et le dîner le dimanche. Les clients peuvent apporter leur alcool.