Hausse du salaire minimum: des pertes à éponger pour les agriculteurs

AGRICULTURE – Le gouvernement du Québec augmentera le salaire minimum de 0,75 $ l’heure à compter du 1er mai, passant de 11,25 $ à 12 $ l’heure. Cette hausse de 6,67 % représente un manque à gagner pour les agriculteurs de la région qui embauchent plusieurs travailleurs payés au salaire minimum.

Cela est surtout vrai pour les producteurs dont les cultures sont peu mécanisées, comme pour la laitue.

C’est le cas de Denys Van Winden, propriétaire de la ferme Les productions horticoles Van Winden, à Sherrington. Son entreprise emploie 50 travailleurs étrangers au salaire minimum. Avec une masse salariale d’environ 1 M$, cette hausse du salaire minimum se traduit par une augmentation de 67 000 $ de sa masse salariale.

«Le bond est assez drastique, convient M. Van Winden. On n’est pas contre le fait que le monde gagne un salaire décent, mais c’est le consommateur, à l’autre bout, pour qui les prix vont augmenter, explique M. Van Winden. On ne produira pas en déficit.»

L’ennui, c’est que pour l’année à venir, les contrats de vente de laitue destinée au marché de la transformation ont été conclus avant cette annonce de Québec. Donc, les prix négociés ne tiennent pas compte de cette hausse du salaire minimum.

«Ça nous prend environ deux ans pour s’ajuster avec plus de productivité et de rendement sur la ferme, précise M. Van Winden. Le ministre de l’Agriculture disait qu’il allait verser une ristourne aux producteurs, mais on n’en entend plus parler.»

«Le défi, c’est que les fermes restent rentables. Ce n’est pas de piocher sur le petit travailleur.»

Denys Van Winden, agriculteur

Inattendu

Cette hausse était aussi inattendue pour Marc-André Van Winden, de Fermes Hotte et Van Winden, à Saint-Cyprien-de-Napierville. L’entreprise emploie environ 70 travailleurs payés au salaire minimum.

«On s’attendait à une hausse de 0,50 $ de l’heure, explique-t-il. Cette différence de 0,25 $ représente 35 000 $ à 40 000 $ de plus de masse salariale. Notre inquiétude est de savoir si on va être capable de générer des revenus supplémentaires.»

Selon M. Van Winden, il ne suffit pas de hausser les prix des légumes. «Si les concurrents, comme la Californie, l’État de New York ou du Michigan, ne haussent pas leurs salaires minimums, ça va être difficile de refiler la facture aux consommateurs, pense-t-il. Ça vient gruger directement dans nos marges de profit.»

Mécanisation

Tant pour Denys que pour Marc-André Van Winden, la solution pour minimiser les impacts de la hausse du salaire minimum passe par la mécanisation.

«On travaille avec beaucoup de main-d’œuvre. C’est très manuel, rappelle Denys Van Winden. On va s’en sortir avec la mécanisation, pour faire baisser la masse salariale.»

Même son de cloche du côté de Marc-André Van Winden. La main-d’œuvre représente jusqu’à 25 % des frais d’exploitation de son entreprise. «Nous sommes allés chercher un robot sarcleur en Europe muni d’une caméra. Ça réduit de 50 % le coût du désherbage au champ», dit-il.

À terme, Marc-André Van Winden redoute que ces hausses du salaire minimum entrainent des mises à pied. «Si la cadence continue, ça va se traduire par des pertes d’emplois, prévient-il. Dans les plans d’emballage, ce sont des travailleurs locaux qui travaillent, mais c’est aussi l’endroit où c’est le plus facile à mécaniser.»

Historique du salaire horaire minimum

  • 1er mai 2018: 12 $
  • 1er mai 2017: 11,25 $
  • 1er mai 2016: 10,75 $
  • 1er mai 2015: 10,55 $
  • 1er mai 2014: 10,35 $
  • 1er mai 2013: 10,15 $
  • 1er mai 2012: 9,90 $
  • 1er mai 2011: 9,65 $
  • 1er mai 2010: 9,50 $
  • 1er mai 2009: 9,00 $
  • 1er mai 2008: 8,50 $
  • 1er octobre 1986 : 4,35 $

Source: Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail