Le mécanicien qui aime les Citroën

Anatole Blain voue un véritable amour aux modèles DS des voitures françaises Citroën qui ont été produits entre 1955 et 1975. Sa grange transformée en atelier ne passe pas inaperçue lorsqu’on emprunte la route Édouard-VII à Saint-Jacques-le-Mineur. Le mécanicien d’origine française, arrivé au Québec en 2000, raconte sa passion qui a pris naissance… lors d’un embouteillage à Delson!

Cette passion est née du hasard ?

«Oui, elle a débuté en 2002. Je demeurais alors à Saint-Luc et je me suis retrouvé pris dans le trafic de la route 132 à Delson. J’ai tourné la tête et il y avait la carrosserie d’une Citroën Traction [produite de 1934 à 1957] sur le toit d’une DS. Comme j’ai toujours aimé les vieilles voitures, je me suis arrêté pour rencontrer son propriétaire, Jean-Pierre Durand. Il a eu un garage Citroën de 1967 à 2007 et il a demeuré à Sainte-Catherine. Au fil du temps, il est devenu comme mon père. Avec l’âge et la santé, il n’a pas pu suivre sa clientèle et c’est moi qui en ai hérité. Il est décédé en 2016. Avec les années, j’ai aussi hérité de la clientèle d’autres mécaniciens de Citroën au Québec avec qui je me suis lié d’amitié.»

 

Vous ne devez pas être nombreux à exercer cette spécialité ?

«Je suis le seul avec ce savoir-faire dans la région. J’ai de la clientèle qui vient d’Ottawa, de Québec, de Trois-Rivières, de Montréal et des environs.»

 

Qui sont vos clients, puisqu’on ne retrouve pas de concessionnaires Citroën au Québec ?

«On ne vend plus de Citroën sur le marché nord-américain depuis 1981. Je peux vous dire cependant qu’une centaine de Citroën DS sont actuellement enregistrées à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ). Mes clients sont des gens d’une cinquantaine d’années qui ont hérité d’une Citroën de leurs parents ou encore qu’ils se souviennent que leurs parents en conduisaient une et qu’ils veulent à leur tour en posséder une.»

 

Craignez-vous une pénurie de pièces ?

«Quand j’ai besoin de pièces neuves, je les importe de France. Au fil du temps, je me suis aussi constitué un stock important de pièces usagées que je peux utiliser.»

 

Vivez-vous de votre métier ?

«C’est un complément de revenu. Je suis mécanicien pour les gros camions. En ce moment, j’ai une dizaine de clients.»

 

Pourquoi un tel engouement pour les DS Citroën ? Votre père en conduisait en France ?

«Non! (rires) Mon père travaillait dans un garage agricole, dont la concession appartenait à Citroën. Il conduisait cependant une Peugeot. Une Citroën DS, c’est tout sauf une voiture. Quand elle est sortie en 1955, la DS a réinventé, révolutionné le monde de l’automobile. On dit que la Testla est technologiquement avancée par rapport à son époque, mais la DS l’était davantage en son temps. C’est son système hydraulique qui était révolutionnaire. C’était le cœur principal de la voiture. Les freins, la suspension, l’embrayage des vitesses reposaient sur ce système.  Une DS ça ne roule pas, ça flotte sur la route! On ne sent aucun trou ou imperfection de la chaussée. C’était technologiquement avant-gardiste.»

 

Même sur les routes enneigées du Québec ?

«J’ai roulé de nombreux hivers en DS et elle a une tenue de route exceptionnelle. De plus, sa suspension se lève et s’abaisse; on n’est donc jamais pris dans un banc de neige. On peut régler la hauteur de la caisse comme un veut. Concrètement, quand la DS est au repos, elle se couche comme nous. Quand elle démarre, elle se lève. C’est commun à toutes les DS. Ça demande toutefois un entretien rigoureux et ce n’est pas tous les propriétaires d’alors [lorsqu’elle était vendue du Québec] qui avaient les moyens financiers pour l’entretenir dans un garage Citroën.»

 

Si vous aviez crédit illimité, quel modèle vous vous offririez ?

«Je n’en achèterais pas une au gros prix, mais plusieurs à prix moyen. Je ne veux rien savoir des nouveaux modèles produits après 1990. Parmi tous les modèles, la DS demeure au top.»

 

 

Trois qualités, trois défauts

Le Coup d’œil a demandé à Anatole Blain d’énumérer spontanément trois qualités et trois défauts du modèle DS de Citroën.

«Il n’a pas de défaut [rires]», s’est-il objecté à la blague.

Qualités:

-beau,

-fiable,

-avant-gardiste.

 

Défauts:

-«Quand ce n’est pas entretenu, ça rouille très vite.»

-«Lorsqu’on s’assoit, on ne peut plus en descendre, car on en tombe amoureux.»

-«On ne peut pas faire un coin de rue à bord sans se faire lever le pouce ou se faire prendre en photo.»

 

Des DS dans trois X-MEN

Anatole Blain a déjà possédé jusqu’à cinq DS. «Il m’en reste trois, mais j’en ai acheté sept qui doivent arriver», dit-il.

Il ajoute que certaines de ses voitures ont fait leur apparition dans les trois derniers films de la série X-MEN.

 

Sur Citroën

L’entreprise a été fondée en 1919 par André Citroën et rachetée par Peugeot en 1976. Elle a notamment développé le principe de la traction avant en 1934. Les roues motrices des autres véhicules des compétiteurs étaient alors situées à l’arrière.