Michel Fabry ne regrette aucunement d’avoir déversé 12 000 litres de purin devant l’UPA

Michel Fabry, un producteur laitier d’Henryville, a vidé sa citerne de purin dans le stationnement de l’Union des producteurs agricoles, le 15 mai. Excédé par les fluctuations du prix du lait et inquiet pour la relève, cet agriculteur a senti qu’il devait tirer une sonnette d’alarme.

«Je ne regrette rien, affirme-t-il, malgré les conséquences. Ça me travaillait depuis trois ou quatre jours. Je sentais qu’il fallait que je fasse quelque chose.»

L’homme de 56 ans n’en avait pas parlé à personne, ni à sa femme, ni à sa fille de 28 ans qui se prépare à reprendre sa ferme du rang Saint-Louis.

Une fois les 61 kilomètres parcourus, il a ouvert les vannes autour de 6h39 et déversé ses 12 000 litres de lisier. Quelques minutes plus tard, il a été arrêté par les policiers. Il a ensuite été relâché et pourrait comparaître devant la justice pour faire face à des accusations de méfait de plus de 5000$.

Plusieurs motifs ont guidé son geste, mais une chute de 2,99$/hectolitre de lait en avril a été «la goutte qui a fait déborder le vase».

«Supposément qu’on avait une entente et que le prix devait se stabiliser. Il l’a été pendant quelques mois, mais nous avons eu une baisse le mois dernier. C’en était trop», confie-t-il.

Relève

Michel Fabry pensait à la relève du Québec. Il a acheté sa ferme en 1985 avec l’aide de son père. Il a toujours cru qu’il l’offrirait à sa progéniture. Mais voilà, il craint qu’il s’agisse d’un cadeau empoisonné. «Depuis deux ans, nous avons 10% de revenus bruts en moins. Cela vient manger tout notre salaire. Nous sommes moins payés, pourtant les consommateurs payent plus cher pour leur lait», rappelle-t-il.

Au cours des dix dernières années, le Québec a perdu près du quart de ses fermes laitières. C’est 2000 entreprises qui ont été rayées de la carte.

«Nous sommes en train de perdre nos petites moyennes entreprises. On dirait que le but est d’éliminer les petits. Les fermes ont le droit d’être. Veut-on vider les régions? C’est tellement beau une ferme familiale où tu vois les jeunes apprendre à travailler de leurs mains. Il ne faut pas défaire ça», estime celui qui détient 80 kilogrammes de quota laitier.

Appuis

Ce coup d’éclat hautement médiatisé n’est pas passé inaperçu. Le téléphone n’a pas dérougi dans les heures suivantes à la Ferme Michel Fabry et Lucie Girard.

Maintenant, il espère que sa démarche fera bouger les choses. Pour sa part, il promet qu’il en a fini avec les actions publiques.

«Je laisse ça aux autres maintenant. J’ai fait ma part», conclut-il.