Plusieurs étudiants travaillent beaucoup trop
Un élève sur quatre à la polyvalente Chanoine-Armand-Racicot jongle avec les études et un travail à temps partiel. En cinquième secondaire, plus de la moitié des jeunes font face à une telle réalité, certains travaillant même de nuit. Alors qu’à l’éducation aux adultes, le salaire sert à subvenir aux besoins essentiels, il permet surtout l’achat de biens de luxe aux adolescents. Ces statistiques ressortent du premier sondage sur la conciliation travail-études réalisé dans deux établissements scolaires de Saint-Jean-sur-Richelieu. Cette étude visait à dresser un portrait de la situation dans le cadre de la lutte au décrochage scolaire. «Les enseignants mentionnent souvent que les élèves se relâchent en cinquième secondaire. Ils sont moins assidus en classe et moins efficaces. Nous avons voulu vérifier s’ils travaillaient trop», explique Éric Yelle, enseignant à la polyvalente Chanoine-Armand-Racicot. Le sondage mené auprès de 1328 étudiants confirme les doutes des professeurs. Plus de la moitié des étudiants de cinquième secondaire travaillent, alors que le pourcentage est légèrement en baisse en quatrième secondaire (30%). Étonnamment, même ceux qui n’ont pas l’âge légal de le faire trouvent le moyen d’avoir un emploi. Ainsi, ils sont 11% à en occuper un en première et deuxième secondaire, comparativement à 17% en troisième secondaire. «Nous avons été très surpris, souligne la directrice de la polyvalente, Maud Innocenti. En cinquième secondaire, plus de la moitié des finissants travaillent et un autre 23% se cherche un emploi. C’est alarmant.» Horaire de travail Autre fait surprenant: la quasi-totalité des répondants, soit 98%, travaille à l’année longue. Quatre élèves sur dix consacrent plus de 15 heures par semaine à ce travail. «Selon les recherches, on suggère une moyenne de dix heures de travail par semaine pour ne pas nuire aux études. On ne peut pas imposer de limites d’heures aux étudiants. Bien que certains réussiront s’ils travaillent 20 heures, on peut penser que ce n’est pas le cas de la majorité», estime Maud Innocenti. Parmi les autres faits troublants, une vingtaine d’élèves ont révélé occuper un emploi de nuit, les jours de semaine. «Il y a des employeurs inconscients. Des étudiants nous ont même mentionné qu’ils allaient perdre leur travail s’ils refusaient cet horaire. C’est incompréhensible», souligne Maud Innocenti. Centre la Relance Pour ce qui est de l’éducation aux adultes, la proportion des élèves qui travaillent plus de 20 heures par semaine est de 70%. Une donnée élevée qui ne surprend toutefois pas la direction du centre La Relance. «La majorité de notre clientèle est constituée de jeunes âgés de 19 à 23 ans. Le tiers d’entre eux ont déjà des enfants. Ceux qui travaillent une vingtaine d’heures réussissent bien. C’est inquiétant lorsqu’ils dépassent 25 heures», soutient Dominique Lachapelle. «Nos élèves ont besoin d’un emploi pour subvenir à leurs besoins, ajoute-t-elle. La conciliation travail-études s’avère donc une condition essentielle au succès.» Biens de luxe La réalité est bien différente à la polyvalente Chanoine-Armand-Racicot, alors que les étudiants avouent que leur gagne-pain sert avant tout à l’achat de biens (69%) ou pour accumuler de l’argent pour un projet (32%). On note toutefois que 11 élèves, soit 3%, indiquent qu’ils sont responsables de leur subsistance, tandis qu’une proportion semblable mentionne avoir un emploi à la demande des parents. Enfin, 5% des jeunes estiment le faire pour orienter leur choix de carrière. Fait à noter, la moitié des élèves ont un cellulaire. Le tiers des jeunes qui en possèdent ne le paie pas, alors qu’un autre tiers défraie 30$ et plus. Employeurs Les résultats obtenus laissent croire aux gestionnaires que des efforts importants doivent être faits pour conscientiser les employeurs à l’importance de la conciliation travail-études. Du coup, la publication des résultats du sondage s’inscrit comme la première phase d’une série d’actions concrètes initiées par les établissements scolaires dans le cadre du déploiement d’une très importante mobilisation régionale sur la persévérance scolaire, dont le dévoilement est prévu pour avril prochain.