Une agricultrice de Saint-Rémi partage son savoir avec des femmes sénégalaises

AGRICULTURE – Brigitte Pigeon, propriétaire des Fermes Pigeon et fils à Saint-Rémi, revient d’un voyage de trois semaines au Sénégal. Elle y était avec la section développement international de l’Union des producteurs agricoles (UPA DI) pour aider quelque 300 femmes à commercialiser le riz qu’elles récoltent.

L’agricultrice participait au projet Bey Dunde, une expression en wolof (la langue la plus parlée au Sénégal) qui se traduit par «cultiver pour se nourrir». Mme Pigeon devait former des productrices de riz pour les aider à se trouver des clients et à vendre leurs produits.

Son amie s’étant désistée peu avant le départ qui avait lieu le 25 octobre, on lui a proposé de la remplacer. Mme Pigeon a reçu une formation de deux jours au préalable pour qu’elle se familiarise avec la culture locale et pour apprendre le fonctionnement des hôtels et des transports.

Mme Pigeon s’est déplacée avec sa fille. Même si celle-ci ne faisait pas partie du projet, elle était présente à titre d’observatrice. Après avoir été accueillie par un membre de l’UPA DI, l’agricultrice a été laissée à elle-même pour la suite du voyage.

«C’est une première expérience que j’ai adorée même si c’était dépaysant, raconte Mme Pigeon. Le plus difficile, c’était d’échanger avec les femmes à cause de la barrière de la langue. C’est difficile de faire ressentir l’émotion quand ce qu’on dit est traduit par une tierce personne.»

Le projet Bey Dunde

Selon l’UPA DI, le riz représente plus de 50% de la consommation en céréales des ménages sénégalais. Ces derniers consomment deux fois plus de riz aujourd’hui qu’il y a 15 ans. Le hic, c’est que la production du pays n’a pas augmenté à la même vitesse. Le Sénégal importe donc une grande quantité de riz pour satisfaire la demande.

«Les familles consomment un sac de 50 kg de riz chaque mois, explique Mme Pigeon. Elles sont en mode survie. Certaines d’entre elles vivent dans des villages enclavés, sans électricité dans les maisons. C’est vraiment comme quand mon père était jeune et qu’il accompagnait mon grand-père à cheval pour aller vendre ses produits au marché Bonsecours à Montréal. Pour certaines familles sénégalaises, c’est encore comme ça.»

Le projet Bey Dunde permet d’aider le pays à réduire sa dépendance aux marchés extérieurs et à favoriser son autosuffisance en riz, notamment grâce à l’aménagement d’une dizaine de petites usines de transformation du riz et à la construction d’entrepôts de stockage.

«Avant, les femmes devaient faire transformer le riz dans les villes avoisinantes et elles le revendaient ensuite à des distributeurs, rappelle Mme Pigeon. Il ne leur restait presque rien après avoir payé les frais liés aux récoltes et les semences.»

Lors de son séjour, Mme Pigeon a aidé ces productrices sénégalaises à élaborer un logo pour leur produit et à établir un plan de commercialisation. Elles ont aussi produit un dépliant publicitaire sur lequel on trouve l’adresse des usines et des recettes.

Mme Pigeon a remarqué que ses enseignements ont eu un écho, principalement chez les productrices de la relève. Elle est convaincue que les notions qu’elle a partagées avec les productrices leur permettront d’augmenter leurs revenus et d’améliorer leurs conditions de vie.

«Je suis certaine que ça va leur être utile, confie-t-elle. Elles étaient toutes motivées de travailler avec de nouveaux équipements. Elles voient que ça va débloquer. Elles sont prêtes à travailler en réseau. Elles étaient impliquées et posaient des questions. Il leur reste à mettre en pratique les façons de faire pour aller chercher des clients comme les hôtels ou les hôpitaux.»

Débuté en 2010, le projet Bey Dunde prendra fin en 2017. Il est financé par les gouvernements canadien et sénégalais. Les producteurs locaux devaient d’abord déposer une mise de fonds et obtenir du financement.

Mme Pigeon ne ferme pas la porte à une deuxième expérience de ce genre.

«J’aimerais bien retourner dans un pays où on parle espagnol, dit-elle. J’aimerais faire plus d’intervention de terrain, voir comment ces gens cultivent et leur donner des conseils.»

Les résultats du projet

Grâce à ce projet, la production de riz est passée de 25 000 tonnes à 70 198 tonnes en 2014-2015, estime l’UPA DI.

Les superficies exploitées sont passées de 6591 hectares à 10 366 hectares en 2009.

Les revenus des producteurs qui étaient de 565$ CAN par hectare lors du démarrage du projet ont grimpé à 913$ l’hectare en 2014-2015.

Six entrepôts pour le stockage du riz ont été construits, précise Jacob Hamel-Jolette, agent de projets pour l’ UPA DI. Ces infrastructures, d’une capacité de 9000 tonnes, permettront à 8542 producteurs de stocker leurs récoltes dans de bonnes conditions.